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KITTY KITTY // FRENCH ORIGINAL
#18 LE FIRMAMENT DE FEU (2/2)

#18 LE FIRMAMENT DE FEU (2/2)

« Par les 79 lunes de Jupiter ! Où suis-je ?

— Sur le pont du Marco Polo. À la place d’un pirate dont l’ordinateur de contrôle a pu hacker l’implant cérébral. »

J’étais redevenu un sapiens ! Du moins, je contrôlais de nouveau un corps humain. Comme si l’expérience des anneaux de Saturne ne m’avait pas suffi !

« Vois-tu Ali ? » demanda le pilote intérimaire de l’Hirondelle.

Une masse ramassée au sol comme seule arme, je me frayai un passage à travers le chaos, bousculant bandits et marins de mes épaulettes d’aciers. Face à moi, les gardes de la C.I.G. dans leur carapace blindée de rouge et de noir ripostaient en ordre.

Entre deux volées, le visage de l’un de mes nouveaux confrères se désolidarisa de sa boite crânienne pour venir recouvrir le plastron de ma cuirasse en kevlar. Le responsable de cette douche d’hémoglobine était Raï. Ou plutôt son sabre doublé d’un calibre .44 Magnum.

« Stop ! hurlai-je tandis que la lame effleura le bout de mon apparente truffe rougie par l’alcool de lune frelaté.

— N’avez-vous donc nul honneur ? Chien galeux !

— Bel oxymore ! Mais vous me comparez à un bien déplorable cousin généalogique ! »

Le samurai éclata de rire avant de pourfendre sans effort le premier assaillant qui tentait de le prendre à revers. Et cela sans avoir à détourner son regard de mon enveloppe d'emprunt.

« Te voilà bien lettré, brigand. Ou bien ai-je affaire à Lee ? Le meilleur chanteur de karaoké de Solaris. Dans ce cas, par quel prodige ?

— Piratage ! miaulai-je en saisissant l’ironie. Savez-vous où est la copilote avec qui je partage avec plaisir ma bien trop mouvementée existence ? »

Raï pointa du doigt une forme rouge de colère qui venait de sauter de la passerelle de commandement. L’instant d’après, j’étais empalé au niveau des reins par ma partenaire équipée d’un sabre d'abordage. Je laissai échapper un cri de douleur bien réel.

« Ravi de te revoir. Je te déteste espèce de…

—  Lee ? » dit-elle en retirant aussitôt sa lame de mes boyaux d’emprunt.

Remis du choc grâce à mon corps cybernétique, j’avais abandonné ma masse pour un fusil mitrailleur arraché des mains d’un cadavre non identifiable.

Profitant de la confusion générée par mon apparente trahison, je parvins à stopper seul une nouvelle vague d’invasion de curieux êtres mécaniques. Ce flux incessant de quadrupèdes belliqueux équipés de tête à scie circulaire descendait de l’un des nombreux pods qui venaient de perforer le maigre blindage du pont de commandement.

À mes côtés, Raï et Ali se débattaient férocement à coup de sabre et de jurons. Tous deux semblaient prendre grande joie à taillader la chair et l'acier de leurs ennemis qui reculaient en désordre vers les coursives.

« Qui a bien pu t'apprendre un tel maniement des armes ? demanda Raï à ma partenaire alors qu’une terrible détonation résonna derrière les ordinateurs de navigation.

— Sir Rodrigue, répondit Ali en se défendant face à l’assaut d’un mutant. Épaté, hein ? Regarde ça ! »

Ma partenaire réalisa une feinte qui fit perdre pied à son adversaire au visage de fouine. Trébuchant contre une console broyée par les balles, celui-ci glissa en arrière avant de se rattraper au panneau de commande. Mon associée lui sectionna alors le poignet puis l'épaule pourtant protégée par une armure. Le cri de douleur du pirate se transforma en gargouillis quand elle lui trancha net la gorge.

« Tu sais qui tu me rappelles à te battre comme une folle furieuse ? poursuivit le samurai tout en rechargeant son .44 intégré par un petit interstice sous la garde.

— Qui donc ? demanda Ali alors que l'assaut baissait en intensité

— Ton père, bien évidemment !

— Tu connais le vieux ? s’étonna ma partenaire avant que je me rende compte moi aussi de l’évidence.

— C’était donc vous à Babylone ? m'enquerrai-je pendant une brève accalmie dans les combats. Avec le collier de perles et la photo sur la tombe de Koviràn ?

— Ah oui ! fit Ali qui venait de faire le lien avec notre passage sur Titan.

— Exactement, avoua Raï en secouant un nouveau bracelet identique à son poignet. Ton père et moi étions amis, il y a fort longtemps. À l’époque, l’Alliance n’existait pas. Nous travaillions pour la Hanse des Chasseurs de Primes et le disco agitait le système ! »

Un choc suivi d’un sifflement aigu nous alerta d’un autre impact de pods d’assaut. L’un d’eux avait traversé l’une des vitres du pont et allait déverser ses occupants pour un second round de sanglants corps-à-corps.

« J’ai été cependant des plus attristé d’apprendre sa mort, poursuivit Kumo Raïda en se préparant pour la nouvelle vague d'assaut. Mais qu’imaginait-il ? Accueillir ainsi des enfants-esclaves évadés de Lunapolis… assurément que quelqu’un allait finir par le dénoncer aux Célestes ou à la Hanse !

— Quoi ? fis-je en laissant glisser de mes doigts ma mitrailleuse. Vous savez pour… »

Contre toute attente, Ali braquait désormais son calibre contre la nuque du samurai. Mais ce dernier ne sourcilla pas.

« Que savez-vous de ces enfants ? demanda Ali.

— Deux petites filles de cuve. Fabriquées et tatouées avant de subir le pire que ces dégénérés de la Lune puisse prodiguer, expliqua son interlocuteur en lui faisant dorénavant face. Deux minuscules mutantes sauvées d’un cargo en perdition après leur fuite du système médian. Deux fillettes qu’il a ensuite élevées comme les siennes. »

Alors que de nouveaux chiens mécaniques à tête de scie débarquèrent des pods, les deux chasseurs de primes se dévisageaient toujours.

« Je suis néanmoins ravi que tu sois devenue digne d’endosser le nom de Koviràn.

— Je préfère simplement porter le mien, rétorqua froidement ma partenaire.

— Fort bien. C’est plus prudent. Mais avec tout le tapage dont le Kitty est responsable à travers le système, ce n’est qu’une question de secondes avant que les Méta-Castes et leurs sbires ne vous retombent dessus ! »

D’un mouvement presque invisible, Kumo Raïda décapita un droïde qui avait tenté de lui sauter sur les épaules.

« Koviràn a donc été dénoncé, intervins-je. Savez-vous par qui ?

— Si j’avais le pouvoir d’occire l’immondice qui fut responsable, croyez-moi, sur mon honneur, je l’aurais fait ! »

Raï braqua son .44 droit sur la tête de mon humaine. Il appuya sur la détente au moment exact où cette dernière s’accroupit. Le pirate qui s’apprêtait à planter sa lame entre les omoplates de ma partenaire eut un hoquet de surprise et s’écroula comme un pantin désarticulé.

Derrière nous, entre les consoles brûlées et les écrans d’ordinateur en miettes se battaient les ultimes fusiliers de la C.I.G. bientôt emportés par la nouvelle vague de pillards qui accompagnait les robots d'attaque.

« Quelle est la situation sur la passerelle ? » demanda Raï après avoir agrippé un soldat descendant les escaliers menant à l’État-major.

L’infortuné ne put répondre, car une balle lui traversa le cou. Une gerbe de sang inonda aussitôt de rouge le plastron de son armure noire.

« Shinjimae ! » hurla le chasseur de primes en déchargeant son calibre sur nos assaillants avant de disparaître dans la mêlée.

Dans la fumée des combats apparut enfin l’aristo-robot, l’épée au clair, se débattant contre la meute hostile qui assiégeait la passerelle de commandement.

« Rodrigue ! » cria Ali pour attirer son attention.

Mais le Commodore fut soudainement bousculé et mis au sol. Disparaissant quelques secondes au milieu des cadavres, il fut ensuite projeté dans les airs, par-delà la rambarde de sécurité.

Fort heureusement, le corps de l’androïde ne toucha pas terre. Nous l’avions réceptionné in extremis afin de préserver sa fragile unité orgatronique.

« Marquis ? Êtes-vous en vie ? demandai-je en lui tapotant la tempe.

— Voilà un visage aussi peu familier que grotesque, me complimenta l’humanoïde en ouvrant ses paupières d'acier. Dame Ali ? Quel est donc ce nouveau compagnon pourtant bien éloigné de vos standards ?

* C’est Lee, répondit l’intéressée. Il a piraté un cyborg.

— Fort bien ! Mais trêve de bavardages car je pense qu’il conviendrait d'abandonner le bâtiment.  Nos réacteurs sont touchés au niveau des convecteurs. »

Rodrigue s’était à peine redressé qu’une forme monstrueuse vint atterrir en face de nous. Celle-ci bloquait notre retraite vers le dernier carré de la C.I.G. qui se dirigeait vers les monopods de secours sous la direction de Raï.

Mi-homme, mi-monstruosité, le Capitaine Morton Osborn possédait plus de dents acérées que Jupiter de lunes. L’impossible Freak T-Rex nous dévisageait de ses yeux jaunes tout en faisant craquer les articulations de ses bras recouverts d’écailles.

« À quel moment, bande de sots de sapiens, avez-vous conclu que concevoir des créatures pareil était une bonne idée ? » hurlai-je en ressentant la peur à travers le moindre de mes implants d'emprunt.

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Ali s’était relevée aux côtés de Rodrigue. Ensemble, ils comptaient se battre contre le monstre qui s’esclaffa bruyamment au milieu du carnage regagnant en intensité :

« Kumo Raïda, l’ex-explorateur Bellescharettes et ce qui ressemble au Fléau des Hemingwest. Une belle brochette pour protéger ce cireur de crédits de Van Hoorn ! »

Osborn se vit tendre par son second la tête décapitée de l’Amiral de la Compagnie des Indes. Puis, sous les rires de ses lieutenants, il croqua dedans comme dans un Twinkie.

Rarement intimidée, ma partenaire se mit en garde avec une nouvelle épée en main. Elle fut aussitôt imitée par le Commodore.

« Dame Ali, nos chemins se croisent mais jamais ne s’enlacent, dit Rodrigue en se tournant vers mon humaine. Il vous faut partir, maintenant !

— Il faudra d’abord me passer sur le corps, Marquis, rétorqua l’intéressée.

— Lee ? demanda alors le Commodore. Rejoignez Kumo Raïda et les derniers survivants, il va nous falloir un corridor de retraite.

— Entendu ! » acquiesçai-je.

Je me saisis moi aussi d’une lame pour me frayer un chemin à travers la mêlée. Derrière moi, le combat s’était engagé avec Osborn qui magnait une hache encore plus grande que lui.

« Raï ! » hurlai-je dans la foule.

Un éclat de mortier me frôla la joue, m’enlevant un peu de revêtement cutané avant qu’une tête n’explose devant moi.

« Lui-même ! répondit le samurai qui apparut derrière.

— Nous devons aller chercher Ali et Rodrigue avec les derniers survivants. Puis abandonner le croiseur par tous les moyens possibles ! »

Mon interlocuteur siffla le rassemblement. Les derniers soldats de la C.I.G finirent de dégager un passage vers les coursives menant à la plate-forme des monopods de secours.

Mais un énorme choc nous jeta presque tous à terre. D’après les alertes sonores, le Marco Polo venait de percuter le flanc droit d’un supercargo. Désormais immobilisé, il était une cible de choix pour les équipages pirates qui lui tournaient autour. Le Man'O’War était donc vaincu !

Parmi les premiers debout, je pus apercevoir Ali se débattant seule au corps à corps avec Osborn. Malgré ses talents de bretteuse, elle brisa son épée contre la garde de son adversaire qui la plaqua au sol d’un coup de queue.

J’avais immédiatement retraversé le pont supérieur, bousculant tout ce que je pouvais. Raï avait essayé de me retenir, mais en vain. C’est avec moi qu’il courait désormais au-devant du danger.

Car Osborn soulevait maintenant ma sapiens à bout de bras. Celle-ci le frappait au visage pour lui faire lâcher prise, mais sans succès. Il se gaussa avant de la mordre au niveau de l’épaule, lui broyant la cage thoracique entre ses mâchoires.

Témoin de la scène et aussi horrifié que moi, Raï déchargea son .44 dans le flanc du reptile géant qui ne fléchit pas. Celui-ci nous fit alors face, ma partenaire toujours dans sa gueule.

Le pirate me mit à terre d’une gifle monumentale, brisant net le cou d’acier de mon hôte. La douleur traversa le cyberespace pour me faire échapper un miaulement dans le Kitty.

Ma vision était trouble et grésillait. Je ne pouvais plus tenir le lien. Entre les parasites qui gangrenaient désormais les yeux bioniques de mon corps d’emprunt, je vis Osborn recracher Ali pour affronter Rodrigue. Puis, le flux vidéo s’arrêta.

« Enfers ! La connexion est coupée ! » hurlai-je à travers mes propres poumons de félin.

J’enlevai les lunettes branchées à l’ordinateur de contrôle. Un goût de sang apparut dans le fond de ma gorge. J’étais de retour dans l'Hirondelle et fus accueilli par le postérieur de Satori, à genou sur le panneau de commande.

« Qu’est-ce qui se passe ? » demandai-je, encore un peu engourdi par ce piratage.

Toutes les alertes du tableau de bord étaient activées sans la moindre exception.

« Regarde autour de toi ! hurla le techie. On s’est fait dégommer ! »

La pauvre essayait de colmater les fuites atmosphériques des impacts de mitrailleuses sur la vitre avant à coup de gel durcissant et de Duct Tape.

« Où est Ada ? demandai-je en pivotant sur mon fauteuil.

— Noisy est derrière toi », répondit-il en reculant vers l’ordinateur de contrôle et les systèmes de radars dont l’alarme venait de s’ajouter au tintamarre.

Ada était dans le siège de copilote. Les yeux clos. Sans vie.

Ce fut le genre de coup dur que le cerveau ne pouvait encaisser et décida de passer outre, sous peine d'arrêt d'urgence émotionnelle.

« Nous devons rejoindre le Marco Polo ! toussai-je à travers la fumée qui s’échappait du dispositif d’air conditionné. Ali a besoin d'aide contre Osborn. Sommes-nous en état de bouger ?

— Oui, mais complètement hors combat ! Tout comme la moitié de la flotte. »

Migraineux, je m’installai au poste de pilotage. Faisant le bilan des appareils et équipements toujours opérationnels, je jetai un bref coup d’œil par-delà les fissures des vitres du cockpit. Le champ de bataille se transformait peu à peu en cimetière d’épaves.

J’aperçus alors le timide soleil. C’était la première fois qu’il scintillait pareillement dans le système extérieur, pourtant si lointain. Ce n’était pas normal.

« Satori ? Vérifie les niveaux d’oxygène, dis-je en prenant les commandes de mon vaisseau. J’ai l’impression de voir trouble. Ou bien est-ce à cause du piratage que ma vision est si sensible ?

— Qu’est-ce que tu vois trouble ? répondit Big Brain en s’agrippant à mon appui-tête de chat. Kuso ! C’est le soleil, ça ? »

D’un coup de rein, Satori était de retour sur le terminal latéral. Le radar émit une alerte.

« Des nefs ! » s’écria-t-il pendant que l’ordinateur de contrôle agonisait sous la rapidité de ses commandes.

Un nouveau vaisseau en forme de galet émergea en effet plus nettement du minuscule disque solaire. Il était suivi par plusieurs de ses compères tout aussi semblables. Selon les instruments, cette curieuse escadrille de pancakes arrivant à toute vitesse était prête au combat avec un système offensif fraîchement activé.

« La Marine ? Non. Ce sont d’énormes bâtiments de chrome ! » m’écriai-je.

Nous fûmes paralysés par ce qui se préparait par la suite. La base plate inférieure du premier vaisseau, braquée vers la bataille, scintillait comme du diamant.

« J’ignore ce qu’il prépare, mais j’espère qu’il vise le vaisseau de ce maudit Freak et pas le Marco Polo qui se trouve juste à côté. »

L’aéronef ne prit pour cible ni l’un ni l’autre. Un rayon solaire coupa en deux un cuirassier de la C.I.G. et une frégate légère qui avait accompagné Osborn dans son offensive. Un arc-en-ciel de gaz et de métal en fusion illumina le cosmos, projetant la mort dans les astres.

« C'est qui ces types ? paniqua Satori. On se croirait dans V ! »

Malgré l’étonnement, l’heure n’était cependant pas à la contemplation de cette arme nouvelle. Sans hésiter, je fis virevolter le Kitty droit dans les combats. La C.I.G., privée d’état-major, manœuvrait autour du T.M.S Yosemite qui avait survécu au premier assaut.

« Le Calamity prend la fuite, intervint Satori à travers son microphone. Il ne faut pas traîner ! »

Le pirate informatique s’était immiscé au poste de la 200 pour la réarmer. Tandis que j’approchai de la passerelle de commandement du Marco Polo, il fusillait les chasseurs ennemis qui frôlaient de trop près les sorties de monopods avec les derniers obus de la réserve.

« Les vaisseaux chromés sont en train d’éjecter d’étranges drones dans tout le secteur, fis-je remarquer en étant le témoin du curieux ballet de lumière. Tu penses à un nouveau coup de canon photonique ?

— Mais je ne sais pas, moi ! Pourquoi crois-tu que j’aie une idée de ce qui se passe ? »

Le Kitty s’amarra difficilement contre l’une des vitres blindées. De l’autre côté, Raï était miraculeusement toujours en vie. Maintenant Ali sur ses épaules, il fit sauter les joints siliconés pour que je puisse déplier gauchement le sas jusqu’au pont.

« Où est Rodrigue ? » hurlai-je pour couvrir les sifflements de dépressurisation une fois dans l’habitacle.

Raï s'engouffra dans ce dernier mais ne me répondit pas. À en croire la ferveur avec laquelle mon associée essayait de retourner sur le Man'O’War, Rodrigue devait être en train de se battre en duel contre Osborn.

« Veux-tu cesser ! finit-il par vociférer. Maudits soient les Koviràn à s’entêter de vouloir mourir pour les autres ! »

Des balles ricochèrent soudainement à l’intérieur de l’Hirondelle.

« Qui nous tire dessus ? » demanda Satori en faisant tournoyer la mitrailleuse en direction du pont et de sa passerelle de commandement.

Nous eûmes un semblant de réponse la seconde suivante quand des murs et du plancher métallique émergèrent des êtres de chrome. D’abord liquides, ces assaillants d’un nouveau type prenaient lentement une forme humanoïde. Moins grands que les androïdes MK de dernière génération, ils possédaient néanmoins leur lourde démarche identique.

« J’ai déjà vu ces types ! confiai-je en laissant l’Hirondelle glisser dans le vide une fois le sas replié. Ils accompagnaient un Céleste dans une salle d’enchères sur Cérès ! »

Ces curieux soldats mécaniques étaient cependant mieux travaillés que l'escorte de l'Arch-Baron rencontré avec Zéphyr. Aujourd'hui, ils ressemblaient à ces vieilles statues classiques qui ornaient autrefois les temples romains ou grecs. Mais entièrement en métal.

Sans sommation, les gardes de chrome ouvrirent de nouveau le feu sur tout ce qui bougeait à l’intérieur du vaisseau de la C.I.G., pirates comme marins.

« Une flotte Céleste ? s’étonna Satori. Kuso ! Qu’est-ce qu’elle viendrait faire ici ?

— Et surtout pourquoi s’attaquer à notre convoi ? Nous sommes du côté du gouvernement !

— Nous leur poserons la question plus tard ! hurla Raï en verrouillant le sas. Il nous faut rejoindre le Calamity !

— Pas sans Rodrigue ! s’écria Ali en se débattant malgré ses os brisés.

— Le Marquis est tombé ! conclut Kumo Raïda. 

— Je refuse de le croire ! mugit ma sapiens en échappant à Raï. Où est Ada ? Tous ensemble ou pourra se farcir ce fils de...

— Ali... intervins-je en verrouillant définitivement le sas avant qu'elle ne puisse sauter de nouveau sur le pont du vaisseau. Ada est morte aussi. »

Sous le choc, ma partenaire se figea contre l'ouverture du sas. Une main ensanglantée contre le hublot, elle se laissa glisser lentement sur le sol alors que l'Hirondelle quittait les lieux.

J'eus le droit à une silencieuse caresse avant qu'elle ne perde connaissance. Sa veste rose était en charpie à cause de la morsure d'Osborn. Ses blessures étaient encore plus graves que je ne le pensais.

« Oubliez le Calamity ! Rejoignons la frégate médicale ! ordonna le samurai en la prenant de nouveau dans ses bras. Immédiatement !

— Et la flotte Céleste ?

— Elle ? Prenez ceci comme une mise en garde de la puissance de votre ennemi ! » maugréa le chasseur de primes.

Satori puisa ensuite dans les dernières ressources du Kitty. Nous fûmes hors de portée lorsque le canon photonique coupa en deux le Marco Polo et la nef noire d’Osborn d’un seul coup.

L’Hirondelle fut enfin propulsée en marge du champ de bataille, soufflée par la destruction du Man’O’War qui embrasa le firmament.

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