Antonio errait dans les couloirs de l'académie, son visage marbré d'indifférence. La réputation qui le précédait suffisait à faire fuir les plus jeunes. Les premières années, arrivées récemment, semblaient l'éviter à tout prix. Mais ce n’était pas un problème pour lui. Il n'avait de place pour personne dans ses pensées, à part ses propres tourments.
Alors qu'il passait devant une salle de classe, il poussa la porte sans préavis et s'installa à côté de Marie, comme si c'était la chose la plus naturelle à faire. Elle, sans surprise ni colère, lui adressa un sourire radieux, reconnaissant cette rare attention.
– Ah, bonjour aîné, vous allez bien ? demanda-t-elle, avec une innocence désarmante.
Antonio, bien qu'habitué à l'évitement des autres, ne pouvait ignorer l'immensité de sa gentillesse. Un sentiment étrange s'empara de lui, presque comme de la culpabilité. Pourquoi une fille comme elle devait-elle souffrir autant, se demanda-t-il intérieurement. Il n'eut pas la force de répondre tout de suite.
– Je t'attendrai à la fin des cours, allons manger ,dit-il finalement, brisant un silence pesant.
Sans attendre de réponse, il se leva et partit, laissant Marie se contenter d'un simple D'accord, senior, je vous attendrai. Mais, alors qu'il traversait le couloir, un poids lourd se posa sur son cœur. Pourquoi cette fille le touchait-elle autant ?
---
Lorsque la journée touche à sa fin, Antonio se retrouve devant la porte de la salle. Marie l'attendait comme convenu, mais à sa grande surprise, une autre personne était là avec elle. Une fille plus jeune, qui semblait le regarder avec une méfiance palpable. Elle pose une question directe, les yeux pleins d'inquiétude :
– Qu'est-ce que vous lui voulez ? Ne menacez pas Marie.
Antonio, toujours aussi calme, répondit d'une voix placide :
This book's true home is on another platform. Check it out there for the real experience.
– Je comprends, je ne lui ferai pas de mal. Si tu ne me crois pas, tu peux me suivre.
Marie, fidèle à son sourire éclatant, répondit simplement :
– Bonsoir, senior !
Antonio lui rendit son salut d'un ton doux et la guida, prenant ses affaires et la conduisant pas à pas. Marie, totalement confiante malgré sa cécité, ne cessait de le remercier de sa gentillesse. Derrière eux, l'amie de Marie hésitait, mais suivait malgré elle.
Antonio savait pourquoi il l'avait amenée. Marie n'avait pas éveillé ses pouvoirs, certes, mais ses yeux étaient spéciaux. Ils lui permettaient de voir les âmes des gens, une faculté qu'elle avait en échange de sa vue. Mais Antonio connaît un moyen de lui rendre la vue, un moyen qui se trouve dans les trésors de sa propre famille : l'Œil du Monde.
Cet artefact, inutile pour sa lignée, permettait de supprimer les pouvoirs en échange de la perception par les yeux. Pour Marie, c'était la chance de retrouver sa vue. Mais avant de procéder, Antonio ressentait le besoin de lui poser une question qui le tourmentait depuis un instant.
– Marie, crois-tu en Dieu ? exigea-t-il, son regard perçant se fixant sur elle.
Marie, un peu surprise par la question, a répondu avec un sourire chaleureux :
– Eh bien, non. Je ne crois pas en lui. J'assiste à la messe chaque dimanche, je prie chaque matin, mais je n'ai jamais cru en l'Église ni en Dieu. Moi, je crois juste en la vie qui nous entoure. Peu importe si c'est un Dieu qui l'a créé, ou si c'est d'une autre manière, je suis juste reconnaissante d'être en vie. Peu importe ma situation. Je crois que ceux qui croisent mon chemin sont là pour une raison, et je ne demande que miséricorde.
Antonio resta un instant silencieux, observant les deux versions de Marie se superposer dans son esprit. Ses derniers mots résonnèrent en lui, que Dieu nous pardonne, d'une simplicité déconcertante.
Un léger sourire se dessina sur ses lèvres. Puis, il utilise l'Œil du Monde. Marie, surprise, eut un instant de doute, pensant qu'elle rêvait. Mais tout était bien réel : Antonio, debout devant elle, ne rappelait plus à l'Antonio qu'elle avait connu jusque-là. Elle le remercie d'un ton plein de gratitude et, contre toute attente, se précipita pour lui offrir un câlin.
– Moi aussi, je ne crois pas en Dieu. Mais s'il en existe un, je lui casserai la gueule pour t'avoir fait endurer tout ça, murmura Antonio, le cœur empli d'une étrange révolte.
Marie éclata de rire, son ton léger et enjoué :
– Calmez-vous, aînée ! Vous m'avez promis qu'on irait manger, non ?
Antonio, un peu déconcerté par sa réponse, sourit malgré lui.
– Oui, allons-y.
Mais alors, une voix pleine de malice se fit entendre derrière eux :
– Les amoureux… Et moi, je dérange peut-être ?
Les deux filles éclatèrent de rire, brisant la tension. Antonio se contente de sourire. Ils se dirigèrent tous les trois vers la pizzeria, un lieu chargé de souvenirs, et ce soir-là, un autre serait gravé dans leur histoire.