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Chapitre 18

Avertissement : Ce chapitre décrit des scènes de combats et de violence de manière relativement crue.

Le pirate pâle se jeta d’un seul coup en avant, son corps au ras du sol et ses longs bras traînant derrière lui, droit vers Raphaëlle. Tolas, dans un grand cri rageur, essaya de l’intercepter d’un coup de sabre vers sa tête qui était maintenant à sa portée, mais Zedek tordit son corps tel un serpent et esquiva le coup sans problème.

Dans le même mouvement, son sabre rasa le pont vers les chevilles du bosco, qui dût sauter pour l’esquiver. Continuant son geste, Zedek releva son bras droit, traçant un arc de cercle qui remontait vers le visage de Raphaëlle, qui para la lame au dernier moment à l’aide de son poignard.

Mais Zedek n’avait pas terminé son assaut. Profitant de son impulsion, il continua sa rotation sur lui-même et, grâce à sa longue jambe gauche, il réussit à mettre un coup dans la nuque de Tolas, renvoyant le pauvre bosco au sol.

Au même moment, il asséna un violent coup de la poignée de son sabre gauche sur le crâne de Raphaëlle, la sonnant légèrement. En un éclair, l’homme pâle fit tourner le sabre dans sa main droite encore en l’air et enchaîna sur un coup directement vers le dos de la jeune femme.

Heureusement pour elle, Tolas prit appuie sur le sol et tournoya sur lui-même, fauchant la jambe d'appui du pirate, lui faisant perdre l’équilibre et déviant son attaque de quelques centimètres. Sans attendre, la louve empoigna le long bras de Zedek et tira en avant en tournant sur elle-même.

Emporté par son propre déséquilibre et par l’impulsion exercée par Raphaëlle, Zedek passa par-dessus l'épaule de la jeune femme et s’écrasa lourdement sur le dos en lâchant l'une de ses armes.

Le pirate serra visiblement les dents, refusant d’émettre le moindre son au moment de l’impact. Raphaëlle tenta de le poignarder mais Zedek, plus réactif, réussit à agripper la jeune femme par la gorge malgré sa position allongée. Il se mit à serrer de toutes ses forces, ses longs doigts faisant quasiment le tour de la gorge de la marine. Alors que Tolas était en train de se relever pour venir l’attaquer, il essaya de lever son autre main pour éventrer Raphaëlle.

Cette dernière était loin d’avoir abandonné. Elle profita du fait que Zedek avait le bras complètement tendu pour attraper fermement l'avant-bras du pirate tout en y plantant ses ongles. Elle enchaîna en lui mettant un coup de genou aussi fort que possible au niveau de son coude. Elle fit levier dans l’autre sens en se laissant tomber de tout son poids et brisa net le bras gauche de Zedek.

Le crac sonore qui s'ensuivit retourna presque l’estomac de Dande. Les yeux du pirate pâle s’exorbitèrent mais il se mordit la lèvre inférieure pour s’empêcher de crier.

Tolas, qui était maintenant juste au-dessus de lui, abattit son arme de toutes ses forces vers son torse mais soudain, Raphaëlle se jeta sur son ami. Moins d’une seconde plus tard, la pointe d’une rapière s’arrêtait pile à l’endroit où se trouvait la tête du bosco auparavant. Les deux marins roulèrent tous les deux sur deux côtés différents et se relevèrent pour voir Lowell debout derrière eux, qui levait un sourcil étonné, ramenant sa rapière devant lui.

-On dirait que tu avais raison, mon cher Zedek, reconnu Lowell tandis que l'autre pirate se relevait lentement, ces enfants sont tout sauf ordinaires.

Le pirate pâle, plein de rage, respirait bruyamment entre ses dents et son corps était visiblement en sueur. Raphaëlle se passa une main sur la gorge et tressaillit de douleur. Zedek avait une force de poigne surhumaine, elle était passée à deux doigts de se faire broyer la trachée.

Alors qu’elle observait à nouveau le pirate pâle, ses yeux furent attirés par une petite flaque rougeâtre qui se formait aux pieds de Zedek et elle ne put s’empêcher de sourire. Ses blessures avaient dû se rouvrir quand elle l’avait projetée au sol. Si Lowell n’était pas intervenu, elle était sûre qu’ils auraient réussi à le tuer.

-Est-ce que tu veux que je te tienne le sabre? demanda Lowell à Zedek sur un ton joueur.

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-J'vais la buter....j'vais la buter....souffla le pirate en respirant de plus en plus fort sans écouter son compagnon.

-C’est parfait, je vais jouer avec le cadeau du capitaine dans ce cas… commença Lowell en se mettant en position de combat.

-Attendez.

Lowell et Zedek s’arrêtèrent de bouger sans quitter Raphaëlle et Tolas des yeux. Scornwallis s’avança vers eux en prenant tout son temps pour observer les deux marins. Quand il arriva derrière ses deux hommes, il passa l’une de ses mains le long du dos de Zedek, qui trembla de douleur mais qui n’osa pas bouger. Il la retira ensuite, tâché du sang de son subordonné, et il porta l’un de ses doigts à sa bouche. A cet-instant, Raphaëlle crut voir les yeux bleus de Scornwallis se mettre à briller avant de reprendre leur couleur normale. Il posa ses mains sur les épaules de Zedek et de Lowell et, sans effort de sa part, les força à se rapprocher de son visage au sourire perpétuellement fixe.

-Je vous interdis de me séparer ces deux-là.

Ses mains se crispèrent d’un coup sur leurs épaules et le visage de Zedek se déforma de douleur alors que les yeux de Lowell s'exorbitèrent.

-J’ai besoin de vérifier quelque chose. Il y a quelque chose chez cette gamine…je sais pas pourquoi mais elle me rappelle quelqu'un, expliqua Scornwallis.

-Bien sûr, capitaine, répondit Lowell avec une petite voix satisfaite.

- Ça devrait pas être trop compliqué de me les ramener en vie, non ?

La position de Scornwallis ne changea pas mais la pression qu'il exerçait sur ses lieutenants s'accentua visiblement. Les veines du front de Zedek devenaient de plus en plus apparentes tandis que les jambes de Lowell s’étaient mise à flancher. Le pirate pâle laissa s'échapper un petit bruit de douleur, ce qui fit déglutir les deux marins de l’Altaïr. Le pirate masqué fini par hocher la tête de haut en bas et Scornwallis relâcha sa poigne sur lui mais il continua de l’exercer sur Zedek, qui baissa la tête pour ne pas montrer son expression.

Plusieurs secondes s’écoulèrent, le corps de Zedek se mettant à trembler de plus en plus fort jusqu’à ce qu’il finisse par essayer de poser sa main valide sur celle de Scornwallis, dont l’expression souriante n’avait toujours pas changé.

-…Oui…oui capitaine, finit par lâcher le pirate pâle avec difficultés.

Ce dernier relâcha enfin l’épaule de Zedek et se retourna en passant sa main pleine de sang dans ses cheveux.

-Allez, au boulot.

Sur ces dernières paroles, Scornwallis se mit à scanner le pont, n’ayant même plus l’air d’enregistrer la présence de Dande à quelques mètres de lui.

Son attention finit par s'arrêter sur les deux Ermythiens qui s'étaient rapprochés du corps de la fillette dans l'espoir de s'enfuir avec elle. La terreur absolue qui traversa leur visage quand ils le virent s’approcher fendit le cœur de Raphaëlle. Elle savait pertinemment qu’elle ne pouvait rien faire pour empêcher Scornwallis de s’attaquer à eux tant que Zedek et Lowell se tiendraient devant elle. Le capitaine avait commencé à s’approcher de ses futures victimes d'un pas nonchalant, ses doigts gigotant dans tous les sens telles des pattes d’araignées rouge et blanche.

-Dande ! s’écria Raphaëlle. Fais quelque chose !

Le pirate, qui était resté silencieux et qui n’avait pas osé bouger d’un pouce depuis le début du combat, leva la tête vers Raphaëlle puis vers Scornwallis, qui l’ignorait toujours. D'une main tremblante, il attrapa le tromblon de Monigam à sa ceinture et il mit le capitaine en joue.

Scornwallis, qui était maintenant debout devant les deux Ermythiens encore à genoux au sol, attrapa le visage du vieillard dans sa main et se mit à le serrer de plus en plus fort, provoquant ses hurlements. La jeune Ermythienne essaya de se jeter sur lui mais le capitaine l’attrapa à la gorge et commença lentement à la soulever avec une seule main, la laissant racler ses bras avec ses petites mains ensanglantées sans broncher. Dande, absolument terrifié par cette démonstration de force, sentit sa volonté flanchée et il abaissa son arme.

-Dande ! insista Raphaëlle en trépignant presque sur place.

L’interpellé plongea son regard dans celui de la louve pendant une seconde puis il tourna la tête comme s’il refusait de voir ce qui allait arriver. Elle connaissait l’émotion qu’elle avait perçu derrière ces yeux. Enfermée dans la cale de l’Altaïr, à attendre que Dokland ne revienne, elle avait sûrement dû avoir la même expression que lui.

Mais plus que de la terreur, ce qu’elle ressentait dans le pirate à cet instant, c’était de la faiblesse. L’homme qui avait tué Monigam, qui les avait aidés à infiltrer la caserne désaffectée et qui leur avait montré la voie vers les tunnels cachés d’Ermythie n’existait déjà plus. Il ne restait qu’un homme tétanisé par sa peur, incapable de sauver quoi que ce soit à part sa propre vie.

Une ombre passa sur le visage de Raphaëlle. Elle sentait la chaleur de la rage lui remplir petit à petit le cœur. Dande était un lâche, elle ne savait pas pourquoi elle avait imaginé qu’elle pouvait compter sur lui. Elle ne pouvait compter que sur elle-même pour les sauver. Personne d’autre.

-Raph’ ! On y va ! s’écria d’un seul coup Tolas en lui passant devant.

La vision du dos de son ami qui se jetait devant elle pour attaquer Lowell fut comme un rayon de lumière dans les ténèbres. Se secouant la tête, elle se jeta à sa suite, revigorée.