Lorsqu’Aileen entrouvrit ses paupières, une forte lumière l'éblouit. Une voix grave répétait une phrase qu’elle ne pouvait discerner des bourdonnements, qui se calmaient. Sa vision devient plus claire, suivie de son ouïe.
« Repose-toi, jeune fille. Tu es en sécurité. Tu as ingéré un champignon vénéneux, alors je t’ai fait vomir. Tu peux repartir, mais je te conseille de te reposer encore un peu. Si tu as des questions, n'hésite pas à les poser » dit l’homme.
Il était grand depuis son point de vue, mais plus sa vision redevient normale, plus elle remarqua sa petite taille. Ses cheveux étaient tel une rivière au courant puissant : gris et resplendissants. Ses mains étaient étonnement charnues par son travail acharné. Il portait un polo beige ainsi qu’une paire de shorts, cachés sous un tablier immaculé. Cet homme semblait être organisé mais bienveillant. Son expérience lui apportait quelques nervures à sa peau. Contrairement aux croyances populaires, l’âge ajoutait un charme ainsi qu’une aura de sagesse.
« Où suis-je? Et qui êtes-vous? »
« Je suis Zéphyr Mao, un ancien apothicaire. Tu te trouves dans ma boutique, un restaurant. Tu peux rester ici aussi longtemps que tu le souhaites» répondit-il.
« Oh, merci, Monsieur Mao. Puis-je savoir pourquoi vous m’avez aidé?»
« Qui laisserait une fille évanouie sur son porche? De plus, eh bien, hésita-t-il avant d’entendre les gargouillements d’estomac de la jeune fille recueillie. Tu peux manger ce plat. Où habites-tu? Je pourrais contacter tes proches »
« Hum… En ce moment, je vivais dans la rue, et…» marmonna Aileen.
« Je vois. J’ai un marché à te proposer. Tu peux travailler avec moi dans mon restaurant. Ton salaire sera de 6 nacl à l’heure au lieu de 10, mais tu auras accès à un toit, une salle de bain ainsi qu’à trois repas par jour. Cela te convient? »
« Oui, lança Aileen avant de se reprendre. Mais… Pourquoi toute cette gentillesse? Je pense également repartir après une semaine. »
« Je… J’avais une fille, et elle avait ton âge lorsqu'elle est morte », déclara Zéphyr en regardant dans le vide, se remémorant de douloureux souvenirs.
Aileen présenta ses plus plates excuses avant de se plonger dans le ragoût. Des légumes tendres flottaient dans la mixture, produisant une vapeur légère. Le goût profond et mariné d’écorce d’un arbre d’Umor, la nation de l’eau, régnait sur l'œuvre. Pour une quelconque raison, l’histoire de la plante surgit dans la mémoire de l'adolescente. Le goût du boubam était puissant mais subtil. Cet arbre grandissait à une vitesse folle, et était souvent blâmé pour sa propagation rapide. Les habitants des terres d’eau furent surpris de découvrir cet éventail de saveurs en tentant tous les moyens de s’en débarrasser. Au dernier recours, ils le goûtèrent et ce fut le coup de foudre. Maintenant, il était apprécié autour des onze terres.
Aileen prit la matinée pour se reposer, se changer, se doucher et découvrir son prochain lieu de travail, quoique temporaire. Zéphyr fut assez lousse sur les règlements : la seule pièce où elle ne pouvait pas entrer sans sa permission était la chambre du maître, et Aileen ne comptait pas briser cette unique règle.
L'adaptation fut rapide. Après un jour d'observation, Aileen remarqua où l’aide était nécessaire : la plonge. Zéphyr Mao était débordé, entre faire les plats, les servir puis nettoyer les couverts. La nouvelle mit toute sa force dans cette tâche, en plus de servir les clients de temps en temps.
Ce deuxième jour se déroula à merveille,et la jeune fille put profiter d’un repas de qualité : une viande fondant en bouche accompagnée d’une purée ornée d’une sauce fumante.
Le soir venu, Aileen eut accès à un bain chaud, sans oublier le lit frais. Presque le tiers de son séjour était écoulé, ce qui peina fortement la serveuse et plongeuse. Sur cette tragique note, elle s’endormit, suite à l’émission de sa prière du soir.
***
« Aileen! La journée commence déjà, lança Zéphyr Mao à l’endormie en projetant un tablier neuf, n’oublie pas de déjeuner!»
Brusquement, l'intéressée s’élança sur le sol. Elle enfila la première tenue qu’elle vit avant de boucler l’habit protecteur dans son dos. En à peine cinq minutes, Aileen se coiffa et brossa ses dents. Goulument, elle fourra une pâtisserie dans sa bouche, qu’elle peina à mâcher. Le goût sucré lui parvient aux papilles lorsqu’elle dévalait l’escalier. En un rien de temps, elle atteignit la caisse nom surveillée pour commencer sa journée de dur labeur.
Elle débuterait aujourd'hui par prendre les commandes, car aucun plat ne nécessiterait de recevoir un coup de chiffon. Les clients se faisaient rares à l'ouverture. Il semblerait que peu d'entre eux soient matinaux. La jeune fille fournit le plus d’efforts à plaire aux clients, pour ensuite nettoyer leurs assiettes. Ces dernières ne semblaient pas très sales, car Aileen suspectait les clients de vouloir profiter de chaque goutte de sauce, chaque miette de pain, chaque gorgée de thé. Il fallait bien accorder au chef que ses œuvres étaient d'un niveau impeccable. À ses côtés, le cuisinier coupait habilement des légumes, qu’il grillait par la suite. La viande fut émincée en quelques mouvements remarquables. Quel professionnel! La journée passa rapidement alors qu’Aileen était attelée à la cuisine, à joyeusement frotter les assiettes, en plus de servir quelques plats à l’allure savoureuse aux clients patients.
Lorsque la jeune fille termina la corvée, elle se retira de la cuisine à la suite à un étirement de son dos, courbé lors du jour ouvrable. L’heure du souper allait bientôt sonner, alors elle troqua son tablier pour une robe légère qu’elle avait trouvé dans le garde-robe de sa chambre temporaire. Le troisième jour s'était écoulé en un rien de temps.
« Aileen, le souper est prêt! »
Cette dernière rejoignit son salvateur, occupé à servir deux bols de riz accompagné d’un poisson cuit.
« Bonjour, monsieur Mao. J’ai emprunté une robe que j’avais trouvée dans la commode de ma chambre, est-ce correct? Ça a l’air délicieux! » lança Aileen après avoir remarqué le plat.
« Tu as… Pris sa robe? Je te rappelle que c'était celle de… de ma fille. S’il te plaît, remets-la où tu l’as prise. Je ne suis pas fâché, juste… » sortit difficilement le vieil homme alors qu’il lâchait un couvert.
Ce qu’elle pouvait être bête! C'était certain que Mao allait être nostalgique en revoyant la robe de sa fille portée. Les méandres du passé pouvaient bien être douloureux, alors la jeune serveuse remit sa trouvaille à sa place attitrée après avoir revêtu l’une de ses tenues habituelles. Honteuse, elle retrouva l’homme ébranlé par la soudaine commémoration d'événements lourds et tragiques. Zéphyr avait perdu sa femme ainsi que sa fille aux mains d’une maladie, heureusement éradiquée depuis. En réalité, sa fille avait été enlevée en raison de cette maladie. Jugeant la jeune traumatisée par la mort de sa mère et infectée par le mal, le temple sacré choisit de « confisquer » cette demoiselle à sa famille. Cet événement suspicieux avait étonné Aileen lorsque Zéphyr lui expliqua la soirée même la rupture de son monde. Jamais Isaroth n'enlèverait une fille à ses parents si elle était bien traitée.
Sur cette ambiance malaisante, la soirée se termina. Aileen fit une prière de gratitude, et demanda un peu d’orientation dans sa vie, différant de ce qu’elle appelait «quotidien», avant de s’endormir. Légèrement soucieuse du futur, elle ressentit la culpabilité peser sur son torse. L'anxiété qu’elle avait éprouvée dans les rues, mélangée à l'impatience, la joie et la peur étaient multiples à supporter.
***
Les journées se déroulèrent ainsi toute la semaine. Rapidement, Zéphyr avait pardonné à Aileen ce faux pas et appréciait beaucoup son aide, qu’il récompensait par des plats frais, un lit, un toit, sans oublier la petite pile de nacl qui s’accumulaient de jour en jour. Ce dernier lâchait souvent des phrases telles que : « Si lire un bon livre prend une semaine, lire un mauvais livre prend deux mois. Ne dépense pas ton énergie sur ces livres ennuyants, mais tente d'en trouver un bon. Applique cela à ton entourage », ou « La mort n’est pas à craindre. Ce sont les regrets qui nous hanteront après la mort. N’oublie pas de poursuivre tes rêves ». Aileen, abasourdie par ces soudaines réflexions, lui proposa de composer un recueil de ces pensées impressionnantes, ce qui mena Mao à considérer l’offre.
Sur une autre note, les acheteurs commençaient à connaître la nouvelle serveuse enthousiaste. Comme pour les derniers jours, les repas étaient servis plus rapidement en raison de l’aide apportée par la jeune fille. Des nouveaux clients, redoutant auparavant l’attente, furent attirés par cette commotion. Les affaires allaient bien pour Zéphyr, qui recevait de nombreuses demandes d’embauche. Il fut rapporté à son attention qu’il devrait bientôt les étudier de plus près.
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« Monsieur? Vous savez que je vais repartir dans deux jours, non? » rappela Aileen au vieil homme, manquant déjà les merveilleux moments où elle discutait avec des clients, ou ceux durant lesquels elle observait la main habile de son patron réaliser des œuvres improbables. Bientôt, elle serait remplacée par de vrais employés. La jeune fille avait maintenant assez de moyens pour survivre quelques jours dehors. L’improvisation était sa clef, pourtant difficilement loyale.
Le sixième jour se termina sur une marche dans le quartier. Les ingrédients étaient en manque. Aileen n’avait pas réalisé que le vieil homme partait le matin acheter les légumes les plus frais, mais maintenant, tout s'emboîtait. Malgré le fait que la jeune fille était un peu dans les nuages, elle remarqua que son tuteur s'éloignait du marché.
« Où allons-nous? » demanda-t-elle, curieuse.
« Je prends souvent une soirée pour visiter mes concurrents du coin. Aujourd'hui, je vais te faire découvrir un petit restaurant avant qu’il ne reparte. Je pense qu’ils seront ouverts encore quelques jours. Le voici...»
Sans s’en rendre compte, elle avait marché jusqu'à chez elle, car la jeune fille se situait au restaurant mobile. Il n’y avait pas de ligne, heureusement, et le duo fut servi par la même personne qu'autrefois. Dahlia, était-ce? Cette dernière semblait de même humeur que la dernière fois, mais elle ne boitait plus.
« Je vais prendre… ce plat-ci. En double. Merci!» échangea rapidement Mao.
Aileen en profita pour saluer cette amie, qui la reconnut, ce qui était surprenant. Tant de clients passaient dans le coin, alors comment l'avait-elle reconnue?! N’y en avait-il aucun autre qui l’avait questionné sur son prénom? En y repensant, cela pouvait être étrange de chercher à connaître quelqu’un à qui personne ne reparlerait.
Dahlia ressorti de derrière le comptoir avec deux petits paniers de frites de boubam accompagnées de légumes fortement assaisonnés. Aileen savoura le plat, tandis que son patron dégusta attentivement le repas. Il prit des notes du service afin de pouvoir donner de meilleures instructions à ses futurs employés.
Aileen eut de la chance de ne pas tomber sur sa famille, qui était vraisemblablement à sa recherche.
Le restant de la soirée se déroula comme à l'habitude. Aileen occupa la salle de bain pendant une dizaine de minutes avant d’en ressortir propre. Elle s'enfonça dans ses couvertures, où elle trouva le sommeil suite à quelques prières.
***
Cette matinée fut marquée par Mao, pénétrant abruptement dans la pièce réservée à Aileen. Inquiet, il l'avertît que les clients avaient fait leur apparition. À son tour anxieuse, l'intéressée enfila son tablier pour rejoindre son patron à l’étage inférieur.
« Bonjour, et désolée de mon retard, dit Aileen à la cliente. Puis-je prendre votre commande? »
« Bonjour, Aileen. Je ne savais pas que tu travaillais ici! J’aimerais bien un bol de ragoût, à prendre dans le restaurant » répliqua une voix familière.
Le destin voulait décidément qu’elle revoit ses amies, car face à elle se tenait Charlie.
« Oh, Charlie ! Ça faisait longtemps, je suis heureuse de te revoir. Ta commande arrive dans quelques minutes »
La serveuse informa le chef cuisinier, avant de contourner le comptoir vers la table où son amie s’était installée. Cette dernière sortit son carnet afin de préserver ce moment en dessin.
« Est-ce que je pourrais voir les autres dessins? » questionna Aileen.
Charlie confirma d’un signe de tête sans quitter le papier du regard. Les lignes qu’elle créait étaient sinueuses, telles des cours d’eau. Son crayon bougeait gracieusement sur le papier, comme si ce dernier dansait. L'œuvre fut rapidement complétée. La profondeur du magasin était bien illustrée, et le jeu d’ombre et de lumières avait un niveau d’élite. Un espace blamc semblait avoir été laissé ainsi, car Charlie ajouterait son plat, bientôt prêt. En attendant son arrivée, l’artiste présenta ses multiples œuvres, meilleures l’une que l'autre, à son amie. Il y avait de nombreux paysages, principalement ceux de Nebris, la ville des ténèbres. Une variété fut cependant à noter, car, entre ces pages reposaient des instants immortalisés par sa plume. À la fin, quelques portraits figuraient. Aileen ne se questionna pas sur le sujet, car elle était plongée dans le talent de son amie.
Lorsque Zéphyr fit son apparition avec un bol de ragoût chaud, Charlie le dégusta, tout en écoutant les dires de son interlocutrice. Les filles s'amusèrent, jusqu'au moment où le devoir interpella la serveuse.
Le restant de la journée se déroula comme les autres, de la vaisselle à laver et des clients à satisfaire. Le soir venu, le plat, maintenant traditionnel de ces soirées mémorables, figurait sur la table. Mao ainsi que son apprentie le dévorèrent avant de s’attarder à leur toilette.
Aileen rejoint la pièce réservée aux invités, où elle pria rapidement. Elle s'endormit difficilement, appréhensive du lendemain décisif.
***
L'excitation, ainsi que le regret réveillèrent Aileen de son profond sommeil matinal. Elle fut prête en quelques instants à travailler. Son déjeuner était, comme à l’habitude, sur la table. Aujourd'hui, contrairement aux autres jours, il était encore fumant. Zéphyr Mao, attelé à la cuisine, la salua d’un regard. Aileen le rejoint pour découvrir qu’il n’y avait aucun client dans la section magasin de la demeure. Malgré le fait que, aujourd'hui, le magasin n'était pas ouvert, le patron continuait d'exercer sa passion pour la gastronomie.
« Y a-t-il quelque chose que je pourrais faire? » demanda la jeune femme.
« Non, mais aimerais-tu discuter devant ces sandwichs que je prépare? »
Aileen, heureuse, répondit à l’affirmatif. Elle accouru à la table, où elle installa une partie de Grakkam. Ce jeu simple impliquait plusieurs stratégies complexes. Il était apprécié à l'international, et des tournois opposant des professionnels étaient populaires chez les fervents joueurs. Cependant, la partie jouée par le patron ainsi que sa protégée n’étaient qu’amicales. Avec un thé ainsi que de petits encas, les multiples parties s'allongèrent jusqu'à la matinée tardive.
La jeune fille quitta la salle à manger afin d’aller dans sa chambre temporaire. Son départ était imminent, alors Aileen rassembla ses biens afin de les mettre dans sa sacoche. Zéphyr fit son entrée avant de s'asseoir sur le lit.
« Tu vas bientôt partir… Je te souhaite une bonne continuation. J’ai beaucoup apprécié ta compagnie cette dernière semaine. En remerciement de ton aide, j'aimerais te donner ceci »
L’homme se dirigea vers la commode, cachant cette robe allant à merveille à l’ex-serveuse. Celle appartenant à sa fille décédée. Il la remit à son interlocutrice, ce qui la toucha énormément. Aileen le remercia chaudement tout en enfilant sa lourde cape.
Elle enfila son sac en rejoignant la porte d'entrée. Encore une fois, elle se retrouverait dehors. Pourtant, c'était ce qu’elle souhaitait. Maintenant qu’elle avait une bonne somme de nacl, elle pourrait survivre un moment avant de découvrir qui croiserait sa route.
Le changement brusque entre le restaurant calme et la rue bondée surprit la jeune fille. Vers la fin de la matinée, tous ces friands travailleurs se ruaient aux étalages, qui lentement se vidaient. L’heure du dîner achalandait apparemment les allées. Aileen s’approcha d’un kiosque, fière de pouvoir enfin payer un repas. Une salade lui fut offerte au prix qu’elle proposa, ce qui fit son bonheur. Elle dégusta son achat en profitant de la fontaine, celle où elle avait fait un malaise une semaine plus tôt. Heureuse, elle déballa son matériel de tissage afin de continuer son passe temps favori devant cette scène idyllique. Le temps passa sans qu’elle ne s’en rende compte, jusqu'à ce que les lampadaires, alimentés par Fons Aeternus, s’allumèrent. Cette chose était, traduite dans la langue actuelle, la source éternelle. Cette machine, cachée par le temple, produisait une quantité astronomique d'énergie, distribuée dans chaque nation. Cette énergie servait à tout, entre permettre d'ouvrir les robinets et déplacer les charrettes automatiques. Elle se déplaçait dans des caniveaux, lumineux de saturation, ornant chaque bord de rue, sans oublier les longues routes vers les nations voisines.
Aileen se leva afin d’aller trouver un endroit pour dormir. Sa patience pouvait lui nuire, surtout lorsqu’elle ne voyait pas le temps passer. Elle se dirigea vers le parc de la dernière fois. Au lieu de s’installer sur le banc en bois, elle choisit d’aller dans l’herbe, qui était bien plus confortable.
Elle reposa sa tête sur le sol moelleux. Les lumières furent tamisées par le feuillage abondant, ce qui facilita la transition vers un état de sommeil. Cette nuit était tranquille, car aucun bruit ne parvenait à son oreille, alors celui de ses battements de cœur ne fut que dupliqué. Le vent avait également besoin de se reposer, aujourd'hui. L’air était léger, en cette soirée. L’herbe soyeuse sur laquelle était reposée lui rappelait l’un de ses tissus. Elle avait effectivement besoin d’un instant de paix.
Cette tranquillité fut suspendue par un bruit sourd, résonnant dans l’allée avoisinante. Quelqu’un approchait son sanctuaire. Quelle fut la surprise d’Aileen de découvrir que cette personne se dirigeait vers le banc à ses côtés, sur lequel était posé ses possessions.
L’homme, vêtu d’un sombre manteau ainsi que d’un chapeau pittoresque, nettoya ses lunettes. Ce bruit horrible de grincements frustra Aileen, qui tentait d’ignorer la venue d’un tel inconnu. Lorsqu’elle s'apprêta à ouvrir la bouche, l’homme scanda :
« Bonjour, Aileen. Viendrais-tu t’asseoir à mes côtés? J’ai ici une missive pour toi »
L'intéressée fut étonnée de cette requête. Cet homme était-il donc un messager? Contrairement à ce que son instinct lui dictait, elle s’approcha pour arracher la lettre des mains gantées du mystérieux postier.
« Chère Aileen Keren,
Selon vos aptitudes à s’adapter, ainsi que vos remarquables compétences au tissage, vous seriez la parfaite candidate pour notre humble institut. C’est pour cette raison que vous aurez une scolarité entière, sans frais, léguée par notre directeur. Vous faites partie des onze élèves ayant reçu cette offre. Veuillez suivre votre garde du corps jusqu’à notre établissement pour plus de détails. Une chambre sur place sera fournie, ainsi que nos enseignements, sans oublier trois repas par jour. Félicitations!
Cordialement,
L’Académie Mendacium »
Le pendentif avait fait du bon travail pour qu’elle soit acceptée dans une école de tissage. L’homme lui ayant remis la lettre devait avoir scanné, en quelque sorte, son fil. La jeune fille n’avait jamais entendu parler d’un tel endroit, mais cela devait être dû à son isolement. Il est vrai que ces parents ne l'avaient sûrement pas préparé à entrer dans une école de magie.
« Alors, souhaiteriez-vous rejoindre notre institut? Ceci sera votre seule et unique chance d’accepter » demanda poliment le garde du corps.
Il ne restait à Aileen qu’à se prononcer sur le sujet. Si elle acceptait, son secret sur son fils serait potentiellement dévoilé. Elle aurait cependant un toit ainsi que de la nourriture. Dans le pire des cas, il ne lui resterait qu’à s’enfuir à nouveau. Elle signa lentement le papier et hocha donc la tête vers l'homme impatient. Ce dernier se leva, alors qu’Aileen prit ses biens. Le duo serpenta entre de nombreuses allées, alors la jeune fille présuma que l’homme avait un faible sens de l'orientation.
Quelques minutes suffirent pour qu’ils se rendent devant un chemin, s'enfonçant en pente dans le sol vers une imposante porte. Cette dernière était ornée d’un somptueux heurtoir, agencé avec des moulures de même teinte. Lorsque cette dernière s’ouvrit sur un élégant hall, elle sut que sa décision était la bonne.