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Sur les cendres de l'Ancien Monde [French]
Chapitre 14 - Le temps révèle toujours la vérité

Chapitre 14 - Le temps révèle toujours la vérité

Le groupe s’occupant des cieux déambulait dans les rues de la ville à la recherche d’un champ de vent. Pour l’instant, ils n’avaient rien trouvé, et continuaient leur promenade.

« Attendez un instant, viens, Kei », dit soudainement Hildegarde en le traînant par le bras vers une boutique, tandis qu’il rechignait.

Dahlia et Aileen se lancèrent un regard inquisiteur, mais aucun des deux ne savait ce qu’elle tramait. Elles s’assirent un instant, pour prendre une pause de toute cette activité. Aileen se demandait si les autres équipes s'en sortaient pour l’instant. Cela faisait peut-être trente minutes depuis leur départ, donc il était peu probable que quiconque n’ait trouvé de quoi d’intéressant.

Hildegarde revint peu de temps après avoir pénétré dans les lieux, flanqué de Kei. Au moins, il ne semblait pas déçu de la trouvaille d’Hildegarde.

« Aileen, j’ai quelque chose pour toi! Tu disais être de niveau filet, si je me souviens bien, donc je t’ai pris cette baguette-tricotin! » fit-elle, heureuse.

Aileen ne savait pas quoi dire. Bien sûr qu’elle avait menti en disant être de niveau filet pour éviter d’utiliser sa magie, mais maintenant, elle n’avait aucune excuse. Pour se débarrasser de l’objet, elle tenta quelque chose.

« Merci beaucoup, tu me sauves! Par contre, je n’ai aucune poche, donc je ne peux pas vraiment le transporter », mentit-elle en imitant une mine désolée.

« Ce n’est pas grave, je peux la cacher ici! Elle rentre parfaitement, et on ne risque pas de la perdre », s’imposa Dahlia en prenant la baguette.

Elle fourra la petite brindille taillée entre son corset et la couche du dessous, semblable à une chemisette. Aileen la remercia d’un signe de tête avant qu’ils ne reprennent la route.

Après cinq minutes, Aileen commença à s’impatienter. Ils avaient parcouru tout le quartier sans tomber sur une seule plaque. Où étaient-elles cachées?

« Peut-être qu’on ne réussira pas à monter en haut. Peut-être qu’on ferait mieux de retourner aux dortoirs », soupira-t-elle.

« Non, j’avais un plan pour si on ne trouvait rien, donc j’imagine que c’est le bon moment. Venez! » confia Dahlia en se dirigeant vers une allée à part.

Les autres la suivirent, curieux de savoir ce qu’elle ferait. Elle les invita encore une fois à s’approcher dès qu’ils furent à l'abri des regards. Dahlia se mit à tisser sous les regards confus de ses camarades.

« Accrochez-vous! » lança la jeune fille en projetant sa toile.

Du vent surgit de sous eux, et les porta, tel qu’il le ferait avec des petites feuilles en automne. Aileen fut effrayée au début,mais s’y habitua rapidement. Elle avait l’impression d’être si légère, en plus de toujours avoir rêvé de pouvoir voler, comme les oiseaux se posant parfois devant sa fenêtre.

La jeune fille, ainsi que ses camarades, prenaient plaisir à cette balade, qui ne se termina que trop rapidement, car ils atteignirent bientôt une plateforme, très en hauteur. Charlie serait morte avant même d’avoir atteint cet étage, se dit Aileen.

« Bon, voudriez-vous monter plus haut? Il me reste suffisamment de fil pour faire ce voyage », proposa Dahlia, légèrement épuisée.

Soulever quatre personnes à des centaines de mètres de hauteur ne devait être une tâche facile. Ils n'étaient qu’à mi-chemin, vu tous ces bâtiments se dressant au-dessus du groupe.

« Non, je pense qu’on devrait prendre une pause. On peut s’aventurer un peu à cette hauteur », dit Aileen.

Hildegarde opina, et ils débutèrent une autre promenade, mais cette fois-ci, avec une vue bien différente. Une brise soufflait, provoquant un léger va-et-vient du pont en corde. C’était étrange de ne voi aucun bâtiment débutant au même niveau que soi. Le jeune fille se serait crue dans un rêve si elle n’avait ressenti de la douleur en rentrant ses ongles dans ses paumes lors de son envol soudain. Aileen voyait l’horizon touffu d’arbres, ainsi que des silhouettes un peu lointaines, devant être d’autres nations.

« Où pensez-vous aller après Auram? » demanda la tricoteuse, s'accoudant sur le garde-fou.

« Je songeais à Glacies. C’est la ville la plus proche », répondit Hildegarde en la rejoignant.

« Je me demande comment ce sera, comparé à ici… »

« Moi, en tout cas, j’ai hâte d’aller à Caelestia et d’enfin pouvoir dormir dans un lit digne de ce nom! » se plaignit Kei, s’ajoutant clandestinement à la conversation.

« On peut bientôt partir », annonça Dahlia, se préparant à tisser.

« D’accord, mais ne t'épuise pas trop, hein? » répliqua Aileen.

Dahlia ne répondit pas, trop occupée à tisser. Hildegarde ainsi que Kei s’étaient rapprochés, prêts à décoller. La cuisinière lança son sortilège, qui les souleva encore du sol. Aileen, ne voulant pas particulièrement regarder quelle distance la séparait du sol, leva son regard. Les bâtiments filaient rapidement, et ils atteignirent rapidement les nuages, plutôt bas. L’air y était frais, mais dès qu’ils furent traversés, l’astre du jour pointa le bout de son nez pour les réchauffer. Il ne restait peu de distance à parcourir avant de se rendre sur la plateforme la plus en hauteur. Dahlia fit un atterrissage des plus brutes, en les laissant tomber de trois mètres au-dessus de la plateforme.

« Désolée », s’excusa-t-elle en peinant à se relever.

« Ce n’est rien », répondit Aileen, quoiqu’elle souffrait plusieurs endroits.

« Venez! » indiqua Hildegarde, à proximité du rebord.

Le groupe s’assembla autour d’elle, avant qu’elle ne pointe sous eux.

« On voit très bien la ville d’ici. On devrait la dessiner, on ne sait jamais quand ça pourrait être utile. De plus, ça a possiblement un rapport avec l’artéfact », souligna la jeune femme avant de sortir de quoi prendre des notes.

Hildegarde avait pensé à tout avant leur départ. Non seulement Aileen ne savait même pas qu’ils avaient des crayons en surplus, mais elle avait réussi à trouver de la place pour du papier.

« Quelqu’un a de l’expérience en dessin, ou penserait être capable de reproduire fidèlement la ville? » demanda-t-elle.

« J’ai eu des cours de dessin », se proposa Kei, en prenant de ses mains le matériel.

Il commença à tracer des formes, mais Aileen ne voyait pas bien le résultat. Ce ne fut pas bien long avant qu’il leur tende le résultat. C’était… maladroit. Certaines lignes, supposées être droites, ne l'étaient pas, et il y avait des choses qu’Aileen ne reconnaissaient même pas en comparant la feuille avec la vue.

« Bon… Euh… J’imagine… qu’on peut continuer », dit Hildegarde, prise de court.

Personne d’autre ne voulait s’essayer, ni froisser Kei, qui semblait très fier du résultat. Le groupe reprit donc la route, étant d’autant plus attentif afin de trouver quelque chose d’anormal, pourrait les guider.

Aileen réalisa qu’ils n’avaient aucune idée de ce qu’ils cherchaient, entre ces ponts en corde. Elle suggéra de revérifier le poème.

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« Les vents dictent l’avenir, pointa Hildegarde, peut-être qu’il faudrait attendre que le vent se lève? »

« Je peux le faire! Mais… Sur quoi? » intervient Dahlia.

« Sur des fleurs, peut-être? » tenta Aileen.

« Ou sur ton cœur, rechigna Kei. Il vaudrait mieux abandonner! »

« C’est vrai qu’on va peut-être trop littéralement… » opina Hildegarde, en exécutant son traditionnel regard de réflexion.

Aileen songea un peu au poème. Elle tenta de réordonner les vers, car ils formaient plausiblement une phrase ayant plus de sens. Elle fane comme une fleur, la carte vers mon coeur… La carte vers mon cœur fane comme une fleur, depuis là-haut, tout est visible… Les vents dictent l’avenir, depuis là-haut, tout est visible, la carte vers mon cœur, elle fane comme une fleur…

« Si on réordonne les vers, on pourrait avoir quelque chose comme : Les vents dictent l’avenir, depuis là-haut, tout est visible, la carte vers mon cœur, elle fane comme une fleur, ce qui pourrait signifier que, si on monte assez haut, là où c’est venteux, on verra tout », débuta Aileen.

« Dont une carte… Mais pourquoi fanerait-elle? » termina Hildegarde, comprenant son raisonnement.

« Je ne sais pas, mais on devrait essayer de monter encore plus haut! » s’écria alors Dahlia.

Les autres confirmèrent. Dahlia lança encore une toile, qu’elle venait de tisser, et ils prirent leur envol entre les nuages. Aileen observa ses alentours. Il y avait énormément de nuages, c’était donc difficile de percevoir quoi que ce soit. Attendre dans les cieux ne serait pas une solution, car Dahlia faiblissait.

« Je ne pense pas que c’est la meilleure journée », souligna Kei.

Dahlia les fit descendre, à bout de force.

« On peut juste continuer à marcher sur ces ponts jusqu'à un endroit sans nuages », suggéra Aileen.

Les autres n’étaient pas tant convaincus par cette idée, mais n’en voyant aucune autre, ils opinèrent, et le quatuor prit la route.

Arpenter entre ces maisons, avec ces paysages un peu couverts, était bien relaxant. Aileen ne voyait pas le temps défiler, et elle n’était pas la seule. Il n’y avait toujours rien indiquant que les nuages quitteraient ces lieux, car le vent se faisait capricieux.

« Peut-être que les autres ont déjà la solution, et au pire, on reviendra ici un autre jour », abandonna Hildegarde.

« Je pense que tu as raison. Attendons juste un peu que Dahlia ne reprenne des forces, et on pourra redescendre tranquillement », dit Aileen.

Ils s’installèrent au sol, mais la jeune fille entendit un bruit. Un bruit sonnant étrangement comme un cri de détresse.

« Il y a quelqu’un qui a besoin d’aide! » s’écria-t-elle.

Aileen se releva brusquement, mais ne vit personne réagir.

« Allô? Venez, vite! » insista la jeune fille.

« C’est sûrement un piège », indiqua Hildegarde, ne bougeant pas d’un pouce.

« Et si ce n’en était pas un? Moi, j’y vais! » s’écria Aileen en accourant vers la source du vacarme.

Ses collègues, quoique peu enthousiastes, se contraignirent à la suivre.

Malgré leur incertitude, il ne pouvaient pas la laisser seule devant le danger, sans même la baguette-tricotin.

Aileen se faufila entre quelques allées pour tomber dans un trou perdu. Quelqu’un sanglotait au sol.

« Vous allez bien? demanda-t-elle en s’approchant. Que s’est-il passé? »

« C’est que… je… ils… » gémit la personne, sous une cape.

« Ça va aller », la réconforta Aileen en se penchant vers la victime.

Ses amis venaient de surgir derrière elle. Ils restaient plus sur leurs gardes qu’elle, mais pas assez pour ce qui allait arriver.

La personne empoigna rapidement Aileen, en serrant ses deux bras ensemble, comme le ferait des menottes. D’autres attaquant surgirent du toit, dévoilant leur cachette, et réussirent à attraper Hildegarde, qui se débattit, sans succès. Dahlia et Kei avaient esquiver.

« Maintenant, donnez-moi votre argent », dit l’un des voleurs.

Aileen jura. C’était un guet-apens, et ses collègues avaient eu raison. C’était par sa faute qu’ils s’étaient retrouvés dans ce bourbier.

Quelqu’un débuta une fouille, vérifiant si sa jupe cachait des poches. Le voleur remarqua son pendentif, et l’arracha violemment.

« Ça doit bien valoir une petite fortune, n’est-ce pas, ma jolie? » demanda-t-il en postillant sur son visage.

« Non, ce n’est pas grand chose… » tenta l’otage, mais s’interrompit en remarquant l’air suspicieux de ses ennemis.

« Quelque chose à changé… Je ne sais pas trop quoi, mais il manque un truc… »

Hildegarde scrutait Aileen depuis l’endroit où elle était tenue captive par un voleur faisant trois fois sa taille. Elle devait avoir remarqué son… Peut-importe, elle ne dit rien, ce qui était l’essentiel.

« Relâchez-les! » cria Dahlia, tentant de tisser, mais rien ne fut produit par son sortilège.

« Hahaha! Seulement si vous payez », rétorqua le chef.

Kei tissa une toile, qui vient aveugler les voleurs. Seulement, elle aveuglait aussi ses camarades, donc il cessa immédiatement.

« Pauvre idiot! La plupart des voyageurs sont des riches de Caelestia, penses-tu vraiment que nous ne sommes pas préparés? » pouffa un voleur en retirant sa capuche.

Il fut suivi par le reste de la troupe ennemie, et découvrit des lunettes très opaques, protégeant leurs yeux des rayons éblouissants de Kei. Ce dernier pesta. Aileen commençait peu à peu à retrouver sa vision.

Elle se résolut à agir quand Kei sortit, légèrement hésitant, un sac de dalc. La jeune fille asséna le plus gros coup de pied qu’elle pouvait entre les jambes de son geôlier, qui la laissa aller. Elle tomba au sol, mais rejoignit rapidement ses collègues impuissants.

« Aileen! » s’écria Dahlia en sortant ce que la tricoteuse redoutait : la baguette-tricotin.

Aileen l’attrapa au vol malgré tout. Elle déglutit.

« Je ne sais qu’utiliser la lyre à tisser », essaya-t-elle.

« Tu verras, c’est simple! Il faut faire une sorte de trèfle, et tirer… » expliqua Dahlia avant de se faire attraper par un autre voleur.

Kei fit un regard agacé, même si Aileen n’était pas certaine si c’était pour la capture de Dahlia ou son incapacité à tisser. Peut-être était-ce pour les deux. Peu importe, il lui montra en quelques mouvements comment utiliser l’appareil avant de river son attention sur les voleurs, les encerclant.

« Allez! » pressa Kei en tentant toujours d’aveugler leurs assaillants.

Son objectif premier semblait être de libérer Hildegarde, qui tentait déjà de tisser, mais peinait à le faire dans sa position. Le voleur l’étouffait presque, donc c’était tâche impossible.

« Je… » prononça Aileen, une boule se formant dans sa gorge.

Elle mordit ses lèvres, et quelques larmes glissèrent sur ses joues. Elle était totalement désemparée : ses collègues comptaient sur elle, tandis qu’elle était impuissante. De plus, c’était elle qui les avait fourrés dans cette situation.

« Je ne suis pas capable, je… désolée », prononça-t-elle, paniquant.

« Calme-toi et va-y! » ordonna Kei, perdant peu à peu patience.

« Non, je ne peux pas! »

« Oui, fais juste tisser, calme-toi et tu vas y arriver! »

« Je… ne peux pas. Je ne suis pas capable. JE NE PEUX PAS UTILISER MON FIL », cria alors Aileen, cédant à la pression.

Dès que ces paroles furent prononcées, le jeune fille souhaita les ravaler. Personne, absolument personne n’aurait dû savoir cela, être au courant de sa défection. Les ennemis autant que les alliés la dévisagèrent. Tous avaient cessé de bouger, processant cette information.

Le chef des voleurs éclata de rire. Il fut le premier à réagir.

« Haha, je vois. Tu es faible », déclara-t-il, simplement.

Ces mots résonnèrent dans Aileen. Elle était… faible. Elle se retourna vers Dahlia, lui affichant un regard déplorable. La jeune fille espérait y voir de la compassion, peut-être même un petit sourire, mais pas cette indifférence. Cette fureur, à la limite même du mépris. Elle dit quelque chose, qu’Aileen ne put entendre. Elle n’entendait plus rien, mais elle lut un seul mot, qui sectionna nettement son cœur en deux : « Traîtresse ».

Les larmes coulaient à flot, mais Aileen ne pleurnichait pas. Sa première amie l’avait simplement reniée, et maintenant, elle se retrouverait certainement seule. Elle se sentait seule. La solitude et la tristesse pesaient son coeur, mais aussi la rage. La rage d’être ainsi. La rage d’être faible. La rage d’être… différente.

Sans qu’elle le réalise, ses jambes s’activèrent. Maintenant que sa vie était détruite, que son moral était à zéro, son corps tourna au mode automatique.

Elle fuit. Elle courut, jusqu’à avoir détendu sa souffrance, du moins, en partie. Finalement, elle avait une vie pleine d'aventures, de mystères, d’amitié, celle dont elle avait toujours rêvé, mais il suffisait d’un instant pour que cette vie l’abandonne.