« Tu te rends compte de ce que tu dis là? » rugit Hugo, brisant le lourd silence s’étant installé.
« Tu veux leur rendre service en réparant la machine après ce qu’ils nous ont fait, à nous et à chaque victime? » s'exclama Lloyd.
Aileen ne savait pas quoi répondre face à tant de vigueur.
« Euh… Eh bien… » bégaya-t-elle, incertaine.
« Elle a raison, c’est plutôt sensé », débuta Hildegarde après avoir tenté de comprendre le point de vue de sa camarade.
« Pourquoi voulez-vous les aider? » demanda désespérément Dahlia en dévisageant son amie d’un regard suppliant.
« Laissez-nous expliquer… » débuta Hildegarde.
« Il n’y a rien à expliquer! Vous saviez depuis le début, hein? » accusa Hugo.
Lilith, Frédérique ainsi que Charlie, sans oublier Elizabeth, ne savaient plus où se situer dans cette bataille. Ils regardaient la scène d’un regard impuissant, ne sachant s’ils devaient intervenir ou non.
« Comment peux-tu dire ça? Nous avons autant souffert que vous! De toute manière, ça n’a pas rapport! » s’emporta Hildegarde.
« Mais pourquoi voudriez-vous les aider, alors? »
Aileen n’en pouvait plus. Son sang bouillait, et les voix de ses camarades se mélangeaient, formant un tapage.
« VOUS VOULEZ D’AUTRES VICTIMES?! » cria la tricoteuse.
Le silence suivit ces déclarations. il perdura un instant avant que la jeune fille ne poursuive.
« Vous voudriez qu’on fuit égoïstement, qu’on laisse d'autres innocents tomber dans cette trappe? »
Le groupe resta silencieux un instant à la suite de ces révélations, mais il fut rapidement brisé.
« Désolé, je… je n’avais pas vu ça de cette manière », s’excusa Lloyd.
« Bon, c’est beau, tout ça, mais moi, je suis fatigué de marcher, alors montons dans ce carrosse », intervient Kei, qui guettait pour une opportunité d’éviter de faire cette promenade.
Le groupe, abasourdi par son indifférence, n’avait pas réalisé qu’une embarcations s’avançait tout droit vers eux. Le conducteur fit retentir une clochette afin d’attirer leur attention.
« Vous v’lez un tour? » lança le vieil homme.
Kei répondit à l’affirmative en tendant quelques pièces, qu’il avait sorti d’on ne sait où. Il prit place sur un siège d’un air satisfait, et invita impatiemment ses camarades à le rejoindre.
« Vous pensiez que j’allais faire le tour seul? » s'esclaffa-t-il, tandis qu’Aileen grimpait à bord, pour s’installer aux côtés de ses amies.
« D’où sors-tu tout cet argent? » questionna Frédérique, formulant à voix haute la question que tous se posaient.
« J’ai toujours un sac de pièces avec moi. Aussi, celles en or valent plus, et sont moins volumineuses. C’est plus pratique », expliqua le noble.
« Ah, okay », répondit celui ayant posé sa colle avant que tous ne retombent dans le silence.
Le trajet fut bien plus court à bord du carrosse qu’il l’aurait été à pied. La forêt défilait rapidement, changeant de mixte à feuillus. Aileen ne pouvait songer à autre chose que le futur. Les gardes étaient-ils à leurs trousses? Le groupe aurait-il un futur digne d’être vécu? Allaient-ils même réussir à réparer Aeterna Fons? Comment s’y prendraient-ils? Si leur objectif se trouvait à La Capitale, pourquoi fuyaient-ils? Sûrement pour organiser un plan, pensa-t-elle.
« Oh, regardez! » s’exclama soudainement Dahlia, sortant Aileen de sa torpeur.
La cité d’Auram transperçait l’horizon par son étrange complexion. Elle n’avait pas une organisation en pyramide, comme La Capitale. Même si Aileen avait déjà vu ces blocs lévitants, elle ne savait pas à quel point ils étaient impressionnants, car oui, les bâtiments flottaient. Il n’y avait pas d'organisation particulière, ce qui rendait l’endroit charmant.
« Bon, ct’icitte que j’vous laisse! Bonne journée à vous! » dit le conducteur avant de s’enfoncer dans le contrôle des véhicules, où il serra la main vigoureusement à l’employé.
« C’est… vraiment beau »
La jeune fille porta son attention sur le chef-d’œuvre qu’était la nation, se dressant fièrement devant elle. Les maisons s’étendaient jusqu’à des centaines de mètres de hauteur, à un point où Aileen n'en voyait presque pas la fin. Au sol, elles étaient collées comme des couches de sandwich, n’étant que de trois étages au grand maximum, mais au ciel… Les édifices étaient gigantesques, quoiqu’ils gardaient la forme d’un prisme. Des portes étaient visibles aux endroits les plus improbables, et la plupart donnaient sur le vide. Ils étaient reliés par de rares ponts en cordes, ornés de mousse, et surtout par des cordes, afin qu’il ne partent pas au vent. Sur ces cordes poussaient des fleurs où séchaient des vêtements, semblables à leurs nouveaux ensembles.
Des tuiles colorées s’entassaient maladroitement sur les toits. Les bâtiments étaient bourrés de fenêtres, ainsi que de colombages à palette plus sobre, le tout sur des murs passants de blanc à bleu pastel, sans oublier le jaune. Le tout respirait la joie de vivre, en étant bien animé par des marchés par-ci par-là.
« Je ne m’attendais en rien à ça… » marmonna Charlie.
« N’oubliez pas qu’il faut trouver un logement pour la nuit. On aura certainement pas autant de chance qu’avec Moly et sa taverne », rappela Hildegarde, les ramenant sur terre.
« Ce sera plus simple que ce que tu penses », contredit alors Aileen en pointant les nombreuses pancartes affichant des chambres abordables.
Ils s’aventurèrent dans cette merveilleuse cité, tachant à ne pas se laisser distraire par ses merveilles, bien nombreuses. L’astre du jour toucha bientôt l’horizon, et disparut derrière les nombreuse bâtiments, laisant le groupe dans un noir surprenant, tandis qu’ils erraient entre les allées.
« Dépêchons-nous. Au pire, on tombe sur le mauvais endroit et on quitte », conclut Dahlia.
Ils étaient épuisés des récents évènements, qu’Aileen tentait d’oublier, ainsi que de leur journée chargée en découvertes.
« Allons ici », se résolut Hildegarde en pointant une affiche.
Cette dernière annonçait des dortoirs pouvant accueillir jusqu’à vingt personnes. Ils devaient avoir été pensés pour les groupes de voyage, donc ils ne se génèrent pas. Hildegarde se dirigea vers la réception, flanquée de Kei, le restant du groupe à ses trousses.
« Bonsoir, y a-t-il des dortoirs disponibles pour cette nuit? »
« Ah, bonsoir! J’ai justement deux dortoirs libres. Combien êtes-vous? » demanda l'homme, quittant des yeux son livre.
« Onze », répondit Hildegarde.
« Cela fera… cinquante nacl pour commencer, en y ajoutant cinq par nuit supplémentaire. Si vous désirez rester plus longtemps, avertissez-moi », expliqua le secrétaire.
Kei tendit les pièces requises pour une nuit, et en ajouta une pour qu’ils puissent y séjourner deux nuits additionnelles.
« Merci, monsieur. Voici la clef. La chambre, 04, se situe juste ici », indiqua l’homme en pointant vers le ciel, avant de replonger immédiatement dans son ouvrage.
Le groupe suivit son doigt pour découvrir l’un des blocs lévitant, qui était à une hauteur vertigineuse.
« Hum… Monsieur? Comment sommes-nous supposés y accéder? C’est juste que c’est notre première fois ici » demanda nerveusement Aileen.
« Hahaha, désolé. J’aurais dû vous le dire. Venez, suivez-moi », s’excusa-t-il en quittant le comptoir.
Le groupe le suivit vers l’arrière du bâtiment. Il s’arrêta à côté de ce qui semblait être une bouche d’égout.
« À Auram, il y a quatre manières d’accéder en hauteur. La première est réservée aux habitants, et elle consiste à… voler, expliqua le réceptionniste en s’élevant au-dessus de leur tête. La deuxième est bien compliquée, elle s’agit de tenter de trouver un chemin vers votre destination parmi les ponts en cordes et les cordes elles-même, ce que je ne vous conseille pas. Ensuite, la troisième, pour ceux venant d’autres nations, serait d'emprunter ces champs de vent. Surtout, ne le quittez pas, tentez de stabiliser votre centre de gravité, vers le nombril, avec vos pieds! »
Il atterrit doucement sur la plaque, avant de frapper du pied deux fois. « L’égout » s’illumina d’une lueur turquoise, avant de transporter l’homme vers les chambres. Il faisait paraître la montée bien aisée, puis il se posa sur le rebord non gardé, comme si des marches invisibles le séparaient des dortoirs. Il disparut après avoir penché la tête et leur avoir fait signe de le suivre.
Hildegarde s’y aventura la première, et tout se déroula aussi bien que pour le réceptionniste, qui l’aida à atteindre la plateforme. Elle fut suivie par Lilith, Kei et Hugo. Aileen, impatiente d’essayer, se positionna sur la plaque. La jeune fille tapa deux fois du pied sur cette dernière, qui s’alluma. La tricoteuse s’envola, prenant garde à tenir sa jupe. Au début, elle peina à garder l’équilibre, mais dès que le paysage se découvrit des édifices entassés, elle comprit l’astuce. Garder son centre de gravité aligné avec ses pieds lui permettait de rester droite. Elle atteignit rapidement la plateforme, où elle fut attrapée par l’homme de l’accueil. Aileen rejoignit ses camarades dans l’escalier adjacent après avoir remercié le réceptionniste. Elle s’accota sur la barrière pour pouvoir observer les autres monter, ce que de rares collègues faisaient. La plupart étaient rentrés dans les dortoirs, à la recherche de leur lit.
Dahlia fut la suivante, comprenant rapidement le fonctionnement de l’appareil. Il fallait dire qu’elle était dans son élément. Frédérique, le prochain, eut énormément de difficulté à garder l’équilibre. Il termina couché, mais le réceptionniste l’attrapa aisément par sa ceinture. Elizabeth s’y tenta, rapidement suivie par Killian. Ces trois derniers suivirent les autres dans les chambres.
« Charlie, essaye, c’est vraiment drôle! » s’écria Dahlia, en faisant de gros signes avec ses bras.
L’intéressée ne bougea pas. Lloyd l’invita sur la plaque d’une petite poussée dans le dos. Elle y resta un instant, figée.
« Allez, vas-y! » continua Dahlia.
Charlie se mordait la lèvre inférieure, en se tordant les mains. Elle regardait autour, mais Aileen ne pouvait discerner son état entre l’inquiétude ou l'inattention des règles.
« Tape le sol! » força la cuisinière.
Charlie s’exécuta, mais dès que la lueur turquoise l’illumina, elle changea d’avis. L’artiste fit un pas vers l’avant, mais elle venait de quitter le sol. Elle ne se situait plus vis à vis le champ de vent , à quelques mètres du sol.
« Attention! » cria le réceptionniste, alors qu’Aileen fermait les yeux.
Elle entendit un bruit sourd, et se poussa à vérifier l’état de son amie. La nuit tombait, donc la scène était de moins en moins visible, pourtant, la jeune fille remarqua la silhouette de son amie, qui se relevait.
« Oh, je… désolée!» dit-elle.
Charlie avait atterri sur Lloyd, à moins que celui-ci ne l’ait rattrapée? Aileen n’en était pas certaine, mais elle savait que personne n’était blessé, du moins pas gravement, ce qui la soulagea.
« Aouch! Tu es moins légère que ce que je pensais » ricana Lloyd en se relevant.
« Hé! Mais…merci, je… désolée… » bafouilla-t-elle, embarrassée d’avoir blessé son camarade.
« C’est quand même moi qui s’est jeté sous toi, remarqua le jeune homme, refusant ses excuses. Mais le plus important : Est-ce que ça va? »
« Euh, je… vais bien. J’ai juste… un très gros vertige, et… » dit Charlie, cherchant ses mots suite à ce choc.
« Calme toi, tout va bien, maintenant. Tu es au sol. Ferme les yeux et respire », la rassura-t-il.
Lloyd profita du fait que Charlie fermait les yeux et rattrapait sa respiration pour l’attirer vers lui, sur la plaque. Il activa immédiatement la machine, en tenant fermement l’artiste. Elle paniqua un peu, s’accrochant de toutes ses forces à Lloyd, qui peinait à garder son équilibre. Ils atteignirent après un instant le niveau de la platerforme.
« Vous allez bien, tous les deux? » demanda le réceptionniste en les empoignant.
Il ne reçut aucune réponse, mais comprit que leurs blessures étaient superficielles, voire inexistantes. Il les tira sur le sol, et Charlie se colla au mur, serrant toujours le bras de son camarade.
« C’est bon, tu peux me lâcher. Ici, tu ne risques rien », dit Lloyd en s’échappant doucement de la poigne de l’artiste.
« Oh, Charlie, j’ai eu si peur! » s’exclama Aileen en s’élançant dans les bras de son amie, qui répondit à son étreinte.
« Oh, regardez! C’est la nuit… Appelez donc vos amis pour que je termine mon explication », ordonna-t-il.
Malgré le fait que l’astre du jour avait quitté son poste, la ville reluisait de milliers, de millions de petites lumières, telles des étoiles. Aileen s’empressa d'appeler ses camarades.
« Venez, vite! Il n’avait pas terminé d’expliquer, et c’est juste… Voyez par vous-même », lança-t-elle, souhaitant revenir rapidement à l’extérieur.
Le groupe sortit sa suite, et Aileen observa l’émerveillement sur leur visage. Ces lueurs, vacillantes comme des chandelles, éclairaient gracieusement la ville. Les fleurs, dont la fragrance embaumait l’air nocturne et frais, produisaient de doux éclats, se reflétant aux fenêtres bien nombreuses. Contrairement à ce qu’Aileen aurait cru, la nation de Tempestas avait un charme tout aussi grandiose, et totalement différent, la nuit que le jour.
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« Ce sont les lucioles auramiennes, expliqua le réceptionniste, et elles servent non seulement de lumières, mais également d’ailes. Exemple! »
L’homme se lança dans le vide, à la surprise du groupe. Aileen cria, et ne fut pas la seule. L’impact ne vient pourtant jamais, car, quelques instants plus tard, il réapparut, avec plusieurs petits insectes le ramenant à la plateforme vers laquelle il se penchait.
« Elles sont magiques. Ensorcelées par le Papillon Insouciant, Natalico Hampton elle-même », présenta l’homme, fier.
« Qui? » intervient Hugo.
« Hah! Vraiment? s’inquiéta l’homme. Euh… C’est la fondatrice de la ville! La reine de l’élément Tempestas! Vous devriez relire vos classiques, jeune homme! Oh, avant que j’oublie, pour redescendre, jetez vous au dessus, c’est important, des plaques. Lorsque vous serez proches, elles amortiront votre chute avec un peu de vent! »
Le groupe salua leur guide temporaire avant qu’il ne revienne sur terre. Ils se dirigèrent vers la chambre, où ils se séparèrent les lits, après s’être préparés dans l’une des deux deux salles de bain. Chacun avait un lit à deux étages pour lui seul, ou presque. Lilith ainsi que Lloyd se le partageaient, car les sofa comptaient comme des lits, malgré leur inconfort comparé aux véritables couchettes. Aileen s’était installée à proximité de l’une des fenêtres, et observa, comme dans son ancienne maison, le ciel nocturne, parsemé de minuscules lumières. En faisant sa prière de gratitude, elle s’endormit.
***
Un rayon matinal, atteignant Aileen dans le visage, la réveilla. Elle n’était ni la première, ni la dernière levée. Hildegarde partageait des pâtisseries avec Hugo, Elizabeth, Kei et Killian. Elle devait être partie les acheter plus tôt ce matin. Aileen ne se gêna pas, et prit une énorme bouchée dans l’un des croissants, ce qui appaisa la famine, se creusant doucement depuis son départ de la taverne.
« Maintenant, je pense qu’on peut passer à la prochaine étape : comment réaliser notre but », déclara Hildegarde après avoir terminé son déjeuner.
« Je doute qu’on puisse juste se présenter avec une trousse à outils, sinon, Aeterna Fons serait déjà réparée », remarqua Hugo.
« Oui, mais comment on la répare, alors? Ce n’est clairement pas en l’alimentant, ça ne changeait rien à son état », souligna Kei.
« Hum… Pensons-y un peu : Où est-ce qu’on peut retrouver de l’information sur cette machine? » questionna Hildegarde, menant les réflexions.
« Dans une bibliothèque ou des archives. Il ne reste plus qu’à trouver un livre traitant le sujet », proposa Killian.
« Ce sera long, mais j’imagine que c’est un début », affirma Aileen.
« Très long », se plaignit Hugo.
Le vacarme produit avait réveillé le reste du groupe, qui se joignit à la conversation, et de même au déjeuner.
« Qu’est-ce qu’on recherche, alors? » demanda Dahlia.
« Des infos sur comment réparer Aeterna Fons », répondit Aileen.
« Qu’est-ce que vous avez trouvé, pour l’instant? » interrogea Lloyd.
« On essayait de penser à des endroits où on pourrait trouver ces informations. Pour l'instant, il y avait les archives et une bibliothèque », résuma Aileen.
« Pas idéal », commenta Frédérique.
« Ce ne serait pas plus simple de chercher dans le récit de la création? C’est tout de même une œuvre d’Isaroth », suggéra Lilith.
« Le chapitre quatre devrait aborder des sujets comme ceux-ci, compléta Lloyd. Nos parents sont… très pieux », se justifia-t-il.
« Bonne idée, j’imagine que c’est un meilleur début que la sienne », clama Hugo.
« Par contre, je doute que qui que ce soit l’aille en sa possession, surtout après notre séjour auprès d’Aeterna Fons », pointa Hildegarde.
« Oui, nous devrions aller l’acheter. Je pense que si on y va tous, ce sera plus compliqué qu’à trois ou quatre », intervient Frédérique.
« J’aimerais bien y aller! Et je ne pense pas que Charlie devrait trop emprunter le champ de vent, donc je te conseille de rester ici », s’exclama Aileen, se remémorant les récents évènements.
« Je vais t’accompagner. On aura aussi besoin de Kei, ainsi que l’un des deux experts. Lilith ou Lloyd? » déclara Hildegarde en se levant.
« Vas-y, j’ai pas vraiment envie de partir. De toute façon, t’es meilleure que moi avec ces choses-là », dit Lloyd en s'adossant dans un fauteuil.
« Si tu veux », répondit l’intéressée.
Charlie s’approcha d’Aileen alors qu’elle et son petit groupe allaient franchir la porte.
« Pourrais-tu me rapporter un crayon et un cahier? Les paysages sont si beaux, je ne veux pas les oublier. Si ce n'est pas trop demander. Merci, amuses-toi bien », demanda-t-elle avant de s’éloigner de la porte.
Le quatuor descendit, et lorsque ce fut le tour de la tricoteuse, elle ferma les yeux avant de s’élancer dans le vide. Le sol s’approchait à une vitesse ahurissante, mais la jeune fille fut soulagée de recevoir un gros coup de vent, qui l’ébouriffa, directement sur elle. C’était plutôt drôle, surtout sans peur du vide.
« Promenons-nous un peu, on tombera un jour sur une librairie », proposa Hildegarde.
Il s’avéra qu’elle eut raison, car après avoir flâné dans le coin, Kei remarqua une librairie. Ils y pénétrèrent, et tombèrent face à un petit repère douillet, où quelques élèves étudiaient avec un café.
« Séparons-nous, ce sera plus rapide », proposa Hildegarde.
« Pas besoin, la section sur la religion est juste ici », souligna Lilith.
Le quatuor parcourut les livres sur les nombreuses étagères.
« Oh! » lança Kei.
Le groupe le rejoignit immédiatement. Aileen découvrit qu’il tenait à la main un ouvrage totalement que celui qu’ils recherchaient.
« On ne cherche pas ça », chuchota Lilith.
« Ce n’est pas ça, c’est juste que… j’ai le souvenir d’avoir vu ce signe… Je pense que c’était sur un collier, ou un chandail, ou quelque chose… Ah, oui! Elizabeth avait ce signe en quelque part », résonna-t-il, à voix basse.
« Alors, c’est quoi? Je dois avouer que je suis curieuse. Je n’avais jamais entendu ses prières », s’enquit Aileen.
Kei feuilletta l’ouvrage devant leurs yeux curieux. Il découvrirent des images atroces de tortures et de sacrifices, le noble ferma donc le livre d’un coup sec.
« Attends, c’est quoi, ça? Je ne peux pas croire qu’Elizabeth… » dit Hildegarde en arrachant le livre des mains du noble.
« Je comprends pourquoi elle est si étrange! » lança Kei.
Il reçut un coup de bouquin sur la tête, que ce soit pour sa remarque désobligeante ou son volume de voix dans une bibliothèque.
« Elle est dans une secte. Ils font des choses… horribles. Le genre de secte qui n’arrête pas de torturer des animaux et tuer des humains. Elles sont surtout basées à Spacium, et il semblerait que ce soit un peu familial. Les membres sont séquestrés, d’une manière. Ils ne peuvent pas juste quitter comme cela », expliqua Hildegarde en indiquant les pages conservant ces informations.
« C’est… triste. Mais on s’éloigne du sujet. Et je ne pense pas qu’Elizabeth aimerait tant que ça qu'on fouille dans son passé », remarqua Aileen en s’éloignant un peu dans la rangée.
Les autres semblèrent d’accord, car ils reposèrent le livre d’où il venait et continuèrent leurs recherches.
Quelques minutes passèrent, sans résultat, avant que Lilith ne ressorte l’épais ouvrage qu’Aileen aimait lire de temps à autre. Ils s’agglutinèrent autour de la jumelle, qui ouvrit le bouquin au chapitre quatre.
Lilith lisait les pages en diagonales, sautant certains bout, s’attardant sur d’autres. APrès un instant, elle s’arrêta sur une page, traitant vraisemblablement le sujet. Ses collègues observèrent par-dessus son épaule le minuscule texte.
« Aeterna Fons:
Cet appareil, conçut par les mains du Grand Isaroth lui-même, est alimenté par son énergie. Elle n’apporte que le bien au monde. Elle fournit le monde entier en pouvoir, afin qu’il puisse fonctionner en tant que société. Aeterna Fons a été conçue pour ne pas être touchable. Si un humain venait à entrer en contact avec la machine, il périra. De ce fait, il est impossible de la briser ou de la réparer. Le Grand Isaroth se réveillera si la machine venait à ne plus être fonctionnelle. »
« Ça s’annonce mal, dit Kei. Achetons le livre pour continuer de regarder ça dans la chambre »
Les filles acceptèrent, et ensemble, ils achetèrent l’ouvrage. Le groupe retourna dehors, où il continua sa promenade entre les magasins. Le quatuor se rendit dans un magasin général, où se vendaient des produits d’hygiène, tels que des savons ou brosses à dents. Aileen n’avait pas pu laver ses dents depuis qu’elle était sortie de la cellule, car une poignée était fournie dans la salle de bain, mais personne n’avait songé à les apporter. Elle en profita pour ajouter un cahier et un crayon à la commande, sous le regard intrigué de ses camarades. Kei l’acheta, même s’il n’était pas certain de son utilité.
Aux commissions furent ajoutés quelques fruits, ainsi qu’une miche de pain et un jambon entier. Le quatuor conclut rapidement ces courses par le retour au dortoir, où tous les attendaient.
Aileen prit plaisir à emprunter le champ de vent, prenant bien garde à ne pas quitter la plateforme, en vue des évènement de la précédente soirée.
« Bonjour! » s’exclama-t-elle en ouvrant la porte d’une volée.
« Bonjour », répondit Dahlia, absorbée par des lucioles s’endormant sur le rebord de la fenêtre.
« Salut! »
« Allô »
Ils étalèrent le fruit de leur mission sur la table, et Charlie remercia ses camarades d’un signe de tête en prenant le cahier, où elle consignerait visuellement leurs aventures. Elle se lança de se pas dans un dessin de ce qui semblait être la taverne, avec Molly, Matt et Gall les saluant.
« Alors, on commence par la mauvaise nouvelle : on a juste trouvé que la machine est intouchable et irréparable par les humains. La bonne est qu’Isaroth est censé se réveiller pour la réparer, mais il semble y avoir un problème. Il faut donc le sortir de son état de méditation intense pour solliciter son aide, sans résultat garanti », présenta Hildegarde.
« Donc deux mauvaises nouvelles », résuma Hugo en prenant place sur le canapé.
« Et comment est-ce qu’on le réveille? On ne sait même pas où il se trouve! » intervient Dahlia.
« En fait, si. Il est tout en haut du temple, celui de La Capitale. Par contre, on ne sait toujours pas comment le réveiller, ou même l’atteindre. Je doute qu’il faille simplement rentrer et demander de le visiter », dit Aileen.
« Un paragraphe porte sur comment être son réveil-matin », ajouta Lloyd en feuilletant les récits de la création.
Il chercha un peu avant de lire ce-dit paragraphe. Le jumeau s’éclaircit la gorge avant de résumer ce qu’il venait de trouver.
« En gros, si Isaroth ne le réalise pas et qu’il y a un gros problème méritant son attention, il veut qu’on le réveille. Cependant, on ne peut pas juste y accéder comme ça, il faut traverser une série d’épreuves. Pour ce faire, on a besoin d’artéfacts sacrés, ou quelque chose du genre », expliqua-t-il.
« C’est quoi, ces artéfacts? Est-ce que ça développe dans le texte? » questionna Hildegarde.
« Non… »
« Le sujet est abordé en quelque part d’autre, dans le poème », souligna Lilith.
Son frère parcourut le livre à la recherche de ce fameux poème. L’objet de la recherche semblait se situer au début du livre, vers le chapitre où les humains se firent sauver par Isaroth, qui créa un monde à leur image.
« Voici le poème :
La lumière éternelle saura nous diriger,
Entre la chair, le sang,
Symbole de pouvoir est seul à nous guider,
Ou qu’un éclat passant.
La danse est sans fin,
Ces lueurs, ne nous atteignant guère,
Sur son visage, un masque de chagrin,
Cette pénombre aux alentours est-elle mensongère?
La fleur de la beauté,
Les émotions du festival,
Tous ces gens à mes côtés,
Pourquoi je me sens si seule?
L’histoire est précieuse,
La clef du savoir,
La froideur si mystérieuse,
Pourtant jubilatoire.
Elle fane comme une fleur,
Les vents dictent l’avenir,
La carte vers mon coeur,
Depuis là-haut, tout est visible.
À jamais, que tout soit vénéré,
Pour un moment, des cieux jusqu’au plus bête,
Plus tard, et cette chose en particulier,
Plus tôt, jusqu’à en perdre la tête.
Un réseau complexe, que des noeuds,
Et pourtant, si humain,
Entre ses méandres, son chemin sinueux,
Et si la réponse n’était pas loin?
Les gens souffrent, les gens pleurent,
Qu’un instant, qu’un effort,
Ils crient, ils meurent,
Qu’une goutte de cet or.
Le temps effrite même la vie,
Un ensemble, des couleurs,
Des rochers, des lavis,
Si ravi, il en pleure.
L’eau sacrée, ce cycle intemporel,
Cet instant sur mes lèvres,
Ce sentiment sur mes doigts,
Ces mots dans mes yeux », scanda le jeune garçon.
Lloyd posa le livre sur la table, en prenant garde à le laisser ouvert la bonne page. Aileen processa cette information, tout comme le faisaient ses camarades. Ses pensées furent interrompues par quelqu’un prenant parole.
« Si je comprends bien, chaque verset correspond à un artéfact, à une nation, et nous nous intéressons maintenant au cinquième », résuma Hildegarde.
« Peut-être qu'on devrait essayer d’attribuer chaque paragraphe à une cité », proposa Charlie en sortant son crayon.
« Bonne idée, voyons cela », dit Aileen en s’approchant.
« Le premier semble correspondre à Caelestia, vu qu’il parle de lumière et de monarchie », déclara Kei.
« Le dernier parle peut-être d’Umor, et l’avant-dernier, de Lapisore, suggéra Aileen. Ce sont les seuls à parler d’eau et de roche! »
Charlie nota les idées aux côtés des versets d’une plume délicate.
« Le neuvième ne parle pas de Spacium? » s’étonna Hugo.
« Non, il y a juste des indices de temps inutiles aux vers dans le sixième », remarqua Hildegarde.
« Je n’ai aucune idée pour le septième et le huitième », se plaignit Frédérique.
« C’est pour ça qu’on va par élimination », expliqua Aileen.
« Le deux me fait penser à Nebris, avec ses allusions à l’ombre et la lumière inatteignable », souligna Charlie.
« Et la froideur devrait être reliée à Glacies. Le quatre », dit Hugo.
« Donc il reste Evanidus, Arborem et Calidum, avec le troisième, septième et huitième paragraphe », énuméra Charlie.
« L’or fond avec le feu, peut-être que le huitième verset serait avec Calidum », suggéra Frédérique.
« C’est trop flou comme lien. Nous verrons rendus dans ces nations. Note juste le nom des lieux pour qu’on sache ce qu’il manque », conclut Hildegarde à l’adresse de la consigneuse de notes.
« En attendant, on devrait analyser le verset en lien avec Auram », proposa Aileen.
« Oui, c’est:
Elle fane comme une fleur, ce qui indique peut-être que l’Artéfact est temporaire », lut Charlie.
« Ou que Natalico faiblit, ou que la ville meurt », continua Hildegarde.
« Euh, oui. Après, c’est… les vents dictent l’avenir. J’ai aucune idée de ce que cela pourrait dire! »
« Les vents apportent les nouvelles ou quelque chose comme ça? » tenta Aileen.
« Peut-être que ce serait simplement pour montrer leur puissance, ou pour faire un lien avec Auram », interpréta la jeune fille.
« Ensuite, la carte vers mon cœur », soupira Charlie.
« L’artéfact est une carte » essaya Kei.
« Oh, peut-être qu’on pourrait agencer les vers avec l’autre qui rime, comme:
Elle fane comme une fleur, la carte vers mon coeur. Les vents dictent l’avenir, depuis là-haut, tout est visible! » s’exclama Aileen.
« Ah… c’est compliqué », marmonna Lloyd.
« C’est vrai. Au lieu de jouer aux devinettes, nous devrions agir », confirma Killian, se relevant d’un siège, posant une idée sur la table.
Elle semblait plaire au groupe, car tous se réunirent autour de la table afin d’organiser cette fouille, ce cambriolage.