Depuis son enfance, Hildegarde avait été entraînée à lire entre les lignes, à percevoir chaque infime détail pourrant s’avérer être utile. Elle s’était autant pratiquée à mentir qu’à percevoir ces mensonges. C’est pour cela qu’elle avait rapidement compris qu’Aileen cachait quelque chose, et quelque chose de gros.
Dès que la jeune fille fut privée de son pendentif, Hildegarde sut que son intuition s’était avérée être la bonne. Son aura n’était plus présente. Elle fut cependant subjuguée de voir Aileen craquer. Elle ne s’attendait pas à ce que la jeune fille révèle déjà son secret.
Lorsqu’Aileen s’enfuit, Hildegarde regretta de ne pas avoir agit, mais elle avait d’autres occupations. Personne ne s’activa avant son départ, et Hildegarde profita de cette inattention pour tisser mentalement une toile. Elle créa une bulle, flottant autour de la bouche et de nex de son assaillant, le noyant sur place. Cette faille lui permet de s’échapper de son emprise. L’homme perdit pied, portant ses mains à sa bouche en vaine tentative pour retirer cette bulle. Son regard trahissait sa peur, et Hildegarde fut clémente. D’un claquement de doigt, et dispersa son sortilège. Le voleur commença à tousser, crachotant de l'eau au sol.
Il tenta de dégainer son arme de sa ceinture, mais n’y trouve rien.
« C’est ça, que tu cherches? » lança Hildegarde en brandissant un couteau affiné.
Le voleur l’observa d’un regard furieux, mais la jeune fille était déjà passée à l’attaque. Sous les yeux ébahis de ses camarades, elle infligea quelques coupures rapides et nettes à son ennemi, qui prit peur, avant de se replier.
Hildegarde se retourna, cherchant déjà sa prochaine victime. Il restait huit voleurs, armés de lames plus effrayantes les unes que les autres. Elle se rua sans une hésitation de plus vers l’un de ses opposants. Elle lui affligea un coup rapide là où sa garde était la plus faible, c’est-à-dire vers son épaule, entièrement exposée. Maintenant y trônait une longue entaille, ne cessant de saigner.
L’un des voleurs passa à l’attaque dans le dos d’Hildegarde. Elle esquiva au dernier moment pour lui planter son arme dans le dos. Il retomba lourdement, sans emporter le couteau qui l’avait blessé.
La jeune fille se retourna vers les six restants. L’un gardait Dahlia, donc Hildegarde se le ferait plus tard. Cet échauffement ne la déplaisait pas. Elle se jeta sur son opposant le plus proche, qui bloqua son attaque de couteau. Il ne vit cependant pas venir la jambette qui suivit, le propulsant au sol. En même temps, Hildegarde avait planter sa lame dans la cuisse de l’un des voleurs, qui jura avant de tomber à genoux. Ils ne s’étaient clairement pas entraînés.
Tout ce qu’ils avaient était une belle arme et un groupe. Hildegarde, elle, possédait du talent. De l’expérience. La jeune fille inonda ses opposants d’un douche froide, soudaine. Cette dernière était si puissante qu’elle fit tomber les accessoires des voleurs. Dahlia, également aspergée, faute d’espace, avait littéralement perdu ses élastiques. Elle continua cette parade, profitant de cette diversion, sous les yeux toujours ébahis de ses collègues, qui ne bougeaient pas d’un pouce, en assénant un puissant coup de poing directement sur le nez d’un assaillant. Un petit craquement atteignit ses oreilles, signifiant que son nez avait peut-être cassé. Le voleur contre-attaqua en tentant de la poignarder au visage. Elle ne reçut qu’une mince entaille sur sa joue droite. Hildegarde tenta un coup de pied, qui fut attrapé en plein vol. Pourtant, elle se rapprocha, prête à lancer son prochain coup. Il avait atteint la mâchoire du voleur, qui rejoignit ses collègues au tapis.
Elle dirigeait cette valse. C’était elle qui choisissait ces mouvements coordonnés.
Il n’en restait plus que trois lorsqu’elle frappa à nouveau. L’homme saigna un peu du nez, mais ne semblait pas plus perturbé. Il se remit immédiatement en position de combat, et il frappa. Au dernier moment, Hildegarde esquiva, dégainant la lame qu’elle avait gardé, et la pointant vers le cou de son opposant, qui stoppa brusquement. La jeune fille s’était également arrêtée au milieu de son coup fatal, car quelqu’un avait parlé.
« Stop! Un mouvement de plus et je tue la petite! »
Le voleur tenant comme otage Dahlia gardait sa lame collée à son cou.
« Si tu fais ça, je le tue aussi », riposta Hildegarde, une goutte de sueur perlant sur son front.
« Hah! Fais ce que tu veux avec eux! »
La jeune fille pesta mentalement, prise de court. Elle se contraignit à lâcher sa lame, libérant son propre otage. Hildegarde leva les mains en l’air, abandonnant.
« Je… suis vainc… » commença-t-elle.
Kei, toujours en retrait, interromput sa phrase par un éclat de lumière, atteignant de plein fouet les voleurs. Leurs lunettes avaient été emportées par le flot de plus tôt.
« Ah, euh… merci », dit Hildegarde, voyant les ennemis éblouis, vaincus.
« Huh! Ce n’est pas pour toi que j’ai fait ça! » répliqua-t-il.
Hildegarde libéra Dahlia de l’emprise du voleur, qui la tenait toujours malgré sa cécité temporaire.
« Oh, merci », dit Dahlia en s'effondrant dans les bras de sa camarade.
« Ce n’est pas moi qu’il faut remercier », répondit la jeune fille en aidant son amie à atteindre la sortie, aux côtés de Kei.
« C’était… impressionnant », dit ce dernier à voix basse.
« Tu as parlé? » demanda Hildegarde en levant le regard.
« Non », répliqua le noble en détournant le regard, trop fier pour dire un compliment.
Hildegarde soupira, continuant à traîner Dahlia, qui n’eut rapidement plus besoin de ce soutien. Lorsqu’ils furent de retour sur les ponts en corde, elle prit la parole.
« Est-ce qu’on va chercher Aileen? » suggéra la guerrière.
« Quoi? Elle? Ne vaut pas la peine de se casser la tête pour une menteuse, une incapable! » s’écria la cuisinière.
« Tu forces un peu, là », l’avertit Hildegarde.
« Elle n’avait qu’à ne pas nous mentir », appuya Kei.
La jeune fille baissa le regard, partiellement compatissante pour sa camarade, seule, dans la nuit, ayant perdu la face et ses amis.
« Vous êtes dur avec elle. Si vous insistez tant, on peut y aller », se contraignit-t-elle.
Le trio fut silencieux un instant, se dirigeant vers l’endroit à leur niveau le plus proche des dortoirs.
« Elle ne pourra sûrement pas revenir seule », souligna Hildegarde, signalant que c’était leur dernière chance pour emporter la pauvre Aileen avec eux.
Dahlia l’ignora, tout comme Kei. La cuisinière lança son sortilège, qui les fit descendre en douceur. Ils furent bientôt sur la plateforme au niveau des chambres, qu’ils rejoignirent.
Stolen content alert: this content belongs on Royal Road. Report any occurrences.
« Bonjour! » salua Dahlia en ouvrant la porte.
Ils tombèrent sur une pièce vide. Ils semblaient être les premiers revenus.
« Bon, je vais me faire un café », dit Hildegarde.
Légèrement déçus, Kei et Dahlia s’assirent sur des fauteuils. La jeune fille alluma le feu, préparant son eau. Elle versa la poudre de grains dans un filtre, au-dessus de sa tasse, incluse avec le dortoir.
« Argh, je me demande combien de temps ils vont encore prendre », se plaignit Dahlia en s’enfonçant plus profondément dans le rembourrage.
Elle avait les nerfs à fleur de peau depuis la trahison de son amie. Kei sembla confirmer, mais le fit en fermant les yeux.
« Je ne te savais pas si forte. On aurait presque cru que tu pouvais me battre! » rit le noble en regardant par la fenêtre.
« Ça te dit d’essayer? » répliqua-t-elle sérieusement, un air de défi ornant son visage.
Bien sûr, elle plaisantait, mais Kei ne vit pas cela de ce côté. Il se contenta d’ignorer sa remarque. Hildegarde détourna son attention vers l’eau, qui semblait prête. Elle la versa dans la poudre, décrivant une spirale.
Hugo ouvrit brusquement la porte d’entrée, suivit de Frédérique, Lilith et Killian. Ce dernier avait à la main une malle, émanant de l’énergie élémentaire.
« Salut! Les autres sont revenus? » demanda Frédérique en se posant également sur le canapé.
« Pas l’équipe de Charlie, Lloyd et Elizabeth », expliqua Dahlia.
« Et où est Aileen? » questionna Lilith.
« Oh, celle-là. Vous ne voulez pas savoir. C’est une traîtresse », pesta Dahlia, se renfrognant.
Hugo lui lança un regard interrogateur, auquel la cuisinière ne répondit pas. Kei se chargea des explications.
« C’est une sans-pouvoir. Elle nous a abandonnés durant un combat, donc on ne lui fait plus confiance », présenta-t-il.
Le quatuor venant d’arriver fut surpris. Il buvait les paroles de Kei et Dahlia, proliférant des résumés de leur ressentiments, des actions injustes de leur ex-camarade et d’à quel point elle ne méritait plus sa place entre leurs rangs.
Hildegarde se dit qu’ils exagéraient. Aileen avait été poussée à bout. Elle n’intervient pourtant pas, s’attendant déjà à des piques du style : « Tu prends toujours de son côté, de toute façon, que ce soit dans le placard en forçant Kei à agir ou lors de l’élaboration d’un plan ». C’était faux. Elle prenait chacun de leur côté. Hildegarde avait immédiatement assumé la position de cheffe, et les autres n’avaient pas protesté. Et un chef se devait d’être présent pour chacun des membres de son équipe. Malheureusement, elle était maintenant déchirée entre une membre traitée injustement ou la majorité. Le choix était clair.
« C’est quoi, cette boîte? » demanda alors Dahlia, changeant de sujet.
« Oh, c’est l’artéfact », se contenta de dire Hugo.
Le trio venant des cieux s’arrêta. Ils avaient donc mis la main sur leur objectif? C’était si simple?
« On va l’ouvrir quand les autres seront là », expliqua Killian.
Ils patientèrent tous, installés sur les confortables bancs. Hildegarde avait terminé le café, et ne tarda pas à les rejoindre. Ils attendirent une vingtaine de minutes, où le calme régnait, avant de voir apparaître quelqu’un dans l'entre-bâillement de la porte.
« Oh, euh, bonjour », dit doucement Charlie en entrant.
« Tout le monde est déjà là? » s’étonna Lloyd, à sa suite.
Elizabeth pénétra dans les chambres silencieusement avant de rejoindre un fauteuil plus éloigné. Les deux autres prirent place sur les canapés, là où la place était libre.
« Il manque Aileen?» remarqua Charlie, inquiète.
« Elle nous a trahit en laissant ces trois-là à eux-mêmes durant un combat », s’exclama Hugo.
« Vraiment? Ça m’étonne, après ses exploits lors du combat contre les gardes à la sortie du labyrinthe », déclara l’artiste.
« Elle est une sans-pouvoir », enfonça Frédérique, l’air sombre.
« Qu’est-ce qui le prouve? » continua Charlie, convaincue de l’innocence de son amie.
« Elle n’a aucune aura magique sans son pendentif, puis elle l’a avoué. Par contre, vous forcez un peu », s’imposa Hildegarde, grondant Kei et Dahlia.
« Tu n’as aucune idée de ce que c’est de perdre ainsi une amie », riposta férocement cette dernière.
Hildegarde garda le silence, plongeant son regard dans sa tasse de café. Elle y voyait son reflet. Dahlia avait raison : elle ne savait pas ce que c’était de perdre une amie. Elle n’était pas même certaine d’avoir eut des amis. Mais est-ce que l’on pouvait vraiment dire que la cuisinière avait perdu Aileen?
« Tu as raison. Je n’ai pas d’amis », dit-elle simplement, relevant son regard pour scruter Dahlia, qui semblait un peu embarrassée. L’intéressée détourna le regard, et tous gardèrent le silence. Hugo brisa la malaise suivant cette déclaration par un cri.
« Maintenant, on ouvre la malle! »
« Bonne idée », répondit Frédérique en se dirigeant vers elle.
« C’est quoi? » questionna Lloyd à l’adresse de sa sœur jumelle.
« L’artéfact », affirma cette dernière.
Charlie et Lloyd furent aussitôt captivés par le contenu de cette boîte. Tous étaient impatients de partager leurs trouvailles, mais encore plus de voir le but de leur aventure. Frédérique ouvrit doucement la couverture de la malle, qu’Hugo poussa rapidement, ne voulant faire durer le suspens.
Devant eux se dressaient le fameux artéfact sacré auramien, charismatique, imposant, puissant… qui n’était qu’un tas de cendres. Confus, Hugo en prit une poignée, qui s’écoula lentement entre ses doigts.
« Ce… C’est… Ça a brûlé? »
« Dans le feu des archives », conclut Killian.
« Oh, tout ça pour rien… » se découragea Frédérique.
« On est fichus », déclara Dahlia.
« Attendez, s’interposa Lloyd. Nous avons la solution! »
« Oui, vous n’avez pas partagé vos résultats », confirma la jumelle.
« Depuis là-haut, il n’y avait pas grand chose», présenta Hildegarde avant de se tourner vers le groupe n’ayant encore fournit des explications.
« On a découvert que l’artéfact était une carte de la ville », expliqua Charlie en tendant ses notes.
« C’est génial! » s’exclama Hugo, plein d’espoir.
« Oui, si on a à la fois la puissance de l’artéfact et son apparence d’origine, on ne devrait manquer de rien! » déclara Frédérique, sur la même lancée.
« Il y a un seul problème, s’interposa la guerrière. Non seulement, il y a des nuages en ce moment, et ils vont probablement rester pour la journée qui reste. En plus, on a essayé de dessiner la carte, et puis… disons qu’il manque le talent », s’excusa-t-elle en présentant le morceau de papier.
Kei, insulté, se détourna. Le restant du groupe s’approcha de la feuille pour constater.
« Eh oui, c’est vrai que c’est un problème… Quelqu’un sait dessiner? » demanda Killian.
Personne ne répondit. Hugo et Frédérique n’étaient guère doués en art, tels que les jumeaux, Hildegarde, Kei, Killian, et la cuisinière.
« Elizabeth? » tenta Charlie.
Elle n’eut qu’un petit non de la tête, et baissa la sienne.
« Peut-être qu’Aileen saurait…» débuta-t-elle.
Elle reçut un gros « Non! » à l’unisson. Ils la détestaient seulement après cela, avait remarqué Charlie surprise.
« Mais… Charlie, je pensais que tu savais dessiner », dit Hildegarde, vendant la mèche.
« Euh, pas du tout! » se défendit l’intéressée, apeurée.
« Arrête d’être modeste!» pouffa Dahlia en lui arrachant son cahier des mains.
Elle exposa ses œuvres devant tout le groupe, qui les scruta. Charlie devient rouge comme une mateto, et ce, de la tête aux pieds. Elle empoigna son cahier, qu’elle enfouit sous son oreiller. Tous rirent un peu.
« Arrêtez de vous moquer de moi! » s’exclama l’artiste.
« On ne rit pas de toi, seulement de ta réaction! Tu as vraiment l’air drôle! » rigola son amie.
« Tu n’as vraiment pas l’air de réaliser à quel point tu es talentueuse », pointa Lloyd, ce qui prit de cours Charlie.
Elle semblait gênée, toujours aussi rouge, se cachant le visage dans son oreiller, à la fois par sa réaction, par le fait que tous aient vu ses dessins, que tous riaient un peu d’elle et de ces compliments.
Hildegarde rit de bon coeur avec ses camarades, et ils continuèrent jusqu’au soir. Demain serait le grand jour, où ils cartographieraient la ville. Où Charlie révèlerait sa peur, exprimée à plusieurs reprises. La guerrière s’étonnait que personne n’ait souligné cela de leur artiste, irant se percher sur les points les plus hauts pour dessiner. Qu’elle soit acrophobe.