Les tambours de guerre résonnaient faiblement dans le lointain, rythmant la marche des 600 mercenaires sous le commandement du duc Lothar Hesperia Varnell. À la tête de ce cortège, le Duc montait son cheval d’un air suffisant, son regard fixé sur l’horizon. Une colère froide et une ambition démesurée bouillonnaient dans ses yeux tandis que le paysage sinistre des Terres Maudites se dessinait peu à peu devant eux.
Les montagnes noires déchiraient le ciel comme des crocs menaçants, et la brume sombre qui s’élevait des crevasses semblait presque vivante. L’air, chargé d’une odeur de cendres et de pourriture, pesait sur les épaules des mercenaires, amplifiant le malaise grandissant dans leurs rangs.
Toran, un vétéran aux traits marqués par les années de combat, ne quittait pas l’horizon du regard. Ses yeux, plissés par l’inquiétude, trahissaient une peur qu’il n’osait formuler à voix haute.
« J'la sens pas, cette histoire...»
murmura-t-il en ajustant la lanière de son armure.
« Pourquoi ? On est bien payés, non ? »
répliqua Lyra, marchant à ses côtés avec une nonchalance feinte. Elle resserra la sangle de sa sacoche d’armes et haussa les épaules.
« Tu crois vraiment à ces histoires de démons ? Ce sont juste des contes pour effrayer les enfants. »
Toran grogna, un rictus amer déformant son visage.
« Des contes, hein ? Et pourquoi personne n’en revient, alors ? Tu trouves ça normal, toi ? »
Avant que Lyra ne puisse répondre, Keldor, un jeune mercenaire débordant d’enthousiasme, se joignit à la conversation.
« Peut-être qu’ils étaient juste trop faibles ! »
lança-t-il avec un sourire arrogant.
« Avec le duc Lothar à notre tête, rien ne peut mal tourner. Ces terres ne sont qu’un désert. On entre, on récupère ce qu’il faut, et on ressort. Facile. »
Toran secoua la tête, exaspéré.
« T’es qu’un gamin inconscient. Ce type, Lothar, il nous entraînera tous à la mort avec son ego démesuré. »
Lyra intervint, coupant court à la tension.
« Peu importe. On a signé pour ça. Alors on avance. »
Au sommet de la colonne, le duc Lothar dirigeait son armée d’une main de fer. Sa cape pourpre flottait dans le vent glacial, et son armure dorée scintillait faiblement dans la lumière blafarde. Il se tourna vers ses lieutenants, Orik et Fanel, visiblement agacé.
« Combien de temps encore ? »
grogna-t-il.
« Ces terres ne m’impressionnent pas. Nous devrions déjà être arrivés. Chaque seconde ici est une richesse perdue. »
Orik, un homme pragmatique à l’attitude posée, répondit calmement :
« Nous avançons à bon rythme, monseigneur. Mais ces terres sont... différentes. Peut-être devrions-nous ralentir et évaluer les risques. »
Lothar éclata d’un rire moqueur.
« Des risques ? Tu parles comme un vieillard superstitieux. Il n’y a rien ici. Ces terres m’appartiennent déjà. Nous les prendrons, et le reste du monde s’inclinera devant moi. »
Fanel, plus calculateur, ajouta prudemment :
« Et si les légendes étaient vraies ? Si quelque chose rôde ici ? Peut-être serait-il sage de…»
« Assez ! »
tonna Lothar.
« Nous sommes 600, avec des épées affûtées et des bras robustes. Rien ne peut nous résister. Ces terres sont une promesse de gloire, et je les ferai miennes. »
Son regard flamboya tandis qu’il éperonnait son cheval, accélérant le pas.
Lorsque la troupe arriva enfin au bord d’un immense cratère, un silence pesant tomba sur les mercenaires. La brume, plus épaisse, semblait s’agiter comme un voile vivant. Au centre du gouffre, une silhouette sombre était agenouillée, immobile, le dos voûté.
Toran plissa les yeux, son instinct de vétéran en alerte.
« Qu’est-ce qu’un homme fait seul ici ? »
murmura-t-il, son ton empreint de méfiance.
Lyra fronça les sourcils, la main posée sur la garde de son arme.
« C’est peut-être un piège. »
Keldor éclata de rire.
« Regardez-le ! Il n’est même pas capable de se tenir debout. On est 600, vous croyez vraiment qu’il va nous poser problème ? »
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Toran grogna.
« Tu dis ça, gamin, mais je sens que quelque chose cloche ici. Reste sur tes gardes. »
Du haut de son cheval, Lothar fixa l’homme agenouillé avec un rictus méprisant. Il descendit lentement, sa cape pourpre traînant dans la poussière.
« Eh, toi ! Qui es-tu ? Tu oses te présenter devant le duc Lothar Hesperia Varnell sans même te lever ? »
La silhouette ne bougea pas.
Lothar s’avança, frustré par l’absence de réponse.
« Relève-toi et présente-toi, ou je te ferai exécuter ici-même ! »
Aucun mouvement. Quelques mercenaires reculèrent, mal à l’aise devant ce silence oppressant.
« Très bien, misérable. Si tu refuses de parler, je trouverai ta famille et je les ferai tous exécuter, jusqu’au dernier. »
À ces mots, Aelion releva lentement la tête. Ses yeux, d’abord ternes, s’embrasèrent d’une lueur sombre, profonde et glaciale. Une aura noire commença à s’élever autour de lui, ondulant comme une mer en furie. Le sol sous ses genoux se craquela, incapable de supporter l’énergie dévorante qui émanait de son corps. Le vent s’intensifia, formant une spirale de poussière et de cendres autour de lui.
Un cri guttural s’échappa de sa gorge, un hurlement qui résonna dans tout le cratère. Ce n’était pas le cri d’un homme, mais celui d’une créature déchirée entre la douleur et la rage. Les soldats proches se figèrent, le souffle coupé, et même les vétérans les plus aguerris reculèrent instinctivement.
Aelion se leva, ses mouvements lents et contrôlés trahissant une puissance écrasante. Chaque pas qu’il faisait semblait alourdir l’air, rendant la respiration difficile pour les mercenaires. Son regard balaya la colonne de soldats, et en un instant, l’expression de peur dans leurs yeux alimenta sa colère. Une aura noire explosa soudainement autour de lui, projetant les plus proches au sol.
Toran, les mains tremblantes, murmura :
« C’est pas un homme… C’est un monstre. »
Lyra, figée, serra la garde de son arme, incapable de détourner les yeux de cet être.
« C’est un démon…»
Keldor, dans un ultime sursaut d’orgueil, leva son épée.
« On est 600 ! Il ne peut pas tous nous tuer ! »
Mais avant qu’il ne puisse frapper, Aelion disparut dans un flou noirâtre. Une seconde plus tard, le corps de Keldor s’effondra, décapité net. Le sang jaillit comme une fontaine, éclaboussant les mercenaires proches. Les cris d’horreur éclatèrent dans la colonne.
Des portails noirs s’ouvrirent autour d’Aelion. Ils jaillirent du sol dans une détonation grave, libérant une dizaine de Chevaliers Draconiques. Leurs armures, luisant d’une lumière surnaturelle, semblaient forger une alliance entre ombres et flammes. Ils se placèrent en formation serrée autour de leur maître, leur présence accentuant la terreur qui paralysait les soldats.
Toran lâcha son arme, le souffle court.
« On… on doit fuir… On ne peut rien faire contre ça. »
Le carnage débuta.
Aelion bondit au cœur des rangs ennemis, sa lame draconique scintillant d’une énergie sombre. D’un geste fluide, il balaya un groupe de mercenaires, leur coupant la tête en une seule attaque circulaire. Les Chevaliers Draconiques suivirent, déferlant sur les soldats comme une tempête. Leur précision et leur brutalité étaient inhumaines. Chaque mouvement semblait calculé pour maximiser la terreur : des bras tranchés, des corps brisés, des visages figés dans une expression de pur désespoir.
Les mercenaires tentaient de riposter, mais leurs attaques ne faisaient que ricocher sur les armures des Chevaliers. Ceux qui fuyaient étaient traqués sans pitié. Lothar, qui observait la scène depuis les hauteurs, sentit son cheval se cabrer sous l’effet de la panique.
« Qu’est-ce que c’est que ce démon… ? »
murmura-t-il, blême.
Lyra recula, les yeux emplis de larmes. Chaque cri de ses camarades résonnait comme un glas funèbre.
« On est morts… C’est fini. »
Aelion, au centre du chaos, s’éleva au sommet d’un monticule de cadavres. Son aura noire continuait de grandir, formant une sphère qui pulsait comme un cœur géant. Il leva la lame draconique au ciel, et une onde de choc ébranla le cratère. Les mercenaires tombèrent à genoux, incapables de résister à la pression.
Les Chevaliers Draconiques s’arrêtèrent, formant un cercle parfait autour de lui. Ils inclinèrent la tête, comme pour saluer leur maître.
Un second cri s’échappa de la gorge d’Aelion, cette fois plus animal, plus monstrueux. Ses traits humains commencèrent à se transformer : des cornes sombres émergèrent de son front, ses yeux se changèrent en deux braises rougeoyantes, et des griffes jaillirent de ses mains.
Fanel, l’un des lieutenants du Duc, secoua Lothar, paniqué.
« Monseigneur, nous devons fuir ! Si nous restons, il n’y aura personne pour raconter ce massacre. »
Mais Lothar, paralysé, n’entendait rien. Son regard restait fixé sur la transformation d’Aelion, hypnotisé par la peur.
« C’est l’avènement… du Roi Démon…»
murmura Orik, à bout de souffle.
Alors qu’Aelion était sur le point de libérer une nouvelle vague de destruction, une lumière dorée fendit le ciel. Lilly, petite et frêle, arriva en hâte, ses ailes battant désespérément. En voyant Aelion au centre du massacre, ses yeux s’emplirent de larmes.
« Aelion ! Stoppe ça ! Reprends-toi ! »
hurla-t-elle, sa voix tremblante.
Mais il ne l’entendait pas. Son regard, désormais bestial, ne reflétait qu’une rage incontrôlable. Lilly se posa sur son épaule, ses petites mains tremblant alors qu’elle tentait de le secouer.
« Loriel m’a envoyé… Tu dois revenir à toi ! Ne te perds pas dans ces ténèbres ! »
Elle canalisa une énergie lumineuse, la dirigeant vers l’esprit d’Aelion. Une douce chaleur l’enveloppa, et son aura noire commença lentement à se résorber. Ses traits humains revinrent peu à peu, ses yeux redevinrent ceux d’un homme. Enfin, épuisé, Aelion s’effondra sur le sol, inconscient.
Lilly, à bout de forces, se posa près de lui, des larmes roulant sur ses joues.
« Je suis désolée… si seulement j’étais arrivée plus tôt…»
Elle posa une main lumineuse sur sa tête, murmurant doucement.
« Repose-toi maintenant. Je veillerai sur toi. »
Le champ de bataille, auparavant noyé dans le tumulte et les hurlements, était désormais plongé dans un silence morbide. La lumière du soleil couchant se reflétait faiblement sur le sol jonché de cadavres, sur les armes abandonnées et sur les mares de sang qui imprégnaient la terre.
Seule une brise légère soufflait, chuchotant parmi les ombres laissées par les Chevaliers Draconiques qui, un à un, disparaissaient dans les portails noirs, comme effacés par la volonté d’Aelion.
Le cœur des survivants battait encore, mais seulement par instinct de survie. Lothar, Orik, et Fanel, les visages marqués par la terreur, avaient pris la fuite, laissant derrière eux une armée anéantie. Les deux lieutenants traînaient leur Duc, incapable de parler, incapable de comprendre ce qu’il avait provoqué.
Fanel murmura, brisé :
« Ce n’est pas un homme… C’est… c’est pire qu’un démon…»
Orik, les yeux rivés sur les corps déchiquetés, ajouta, incrédule :
« Peu importe ce qu’il est… Si ce Roi Démon quitte ces terres, ce sera la fin d’Hespéria. »
Lothar, tremblant, trouva enfin sa voix, un murmure rauque à peine audible :
« Il… il doit mourir… Cette chose… Il faut la détruire avant qu’elle ne détruise tout ce qu’on connaît. »
Mais dans leur cœur, ils savaient que ce n’était pas une promesse de vengeance, mais une tentative désespérée de se convaincre qu’ils pouvaient encore agir. Leur fuite ne marquait pas une retraite stratégique, mais un abandon complet de leur fierté, de leur prétendue force.