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Changement : Version Face [French]
Chapitre 6 : Un cadeau des Anges

Chapitre 6 : Un cadeau des Anges

Sans grande surprise, ma nuit fut agitée. Entre des images de démone me pourchassant dans les rues de Valiute, les nombreux retours à ce bus maudit et tout ce que cela implique, je me suis réveillé presque une demi-douzaine de fois, et j’ai fini par rester incapable de me rendormir vers quatre heures du matin. Je commençais à mélanger les deux cauchemars, et la vision du visage haineux de la démone massacrant tout mes amis d’enfance a mit un terme définitif à ma nuit.

Je suis donc resté allongé dans mon lit pendant presque une heure, paralysé, ressassant inlassablement toutes mes craintes, mes appréhensions et mes questionnements sur ce nouveau monde, qui est pourtant si proche du mien. Je ne me sens pas vraiment à ma place ici, dans ce groupe, qui a déjà une histoire, une identité, mais j’espère que ça ira mieux dans les jours qui suivent. Élise et Sekir sont tout les deux vraiment sympas, malgré l’accès de colère incompréhensible de la première hier soir.

Quelle journée d’ailleurs. Je me suis levé d’un rêve magique, suis devenu un ange, ais appris tant sur ce monde si différent du mien, et ais été pourchassé par une démone maléfique, et tout ça en moins d’une journée. J’espère qu’aujourd’hui sera plus tranquille, que j’ai au moins le temps de m’habituer à cette vie.

Finalement, après m’être enfin lassé de rester allonger sans rien faire, et ne souhaitant pas sortir mon téléphone pour aller me perdre sur internet, je décide de me lever. Je me douche rapidement dans la petite salle de bain de ma chambre, m’habille avec un uniforme absolument identique à celui d’hier, cela semble être d’ailleurs les seuls vêtements que j’ai, et quitte ma chambre.

Après avoir erré dans les couloirs durant un peu de temps, je tombe sur une salle allumée. Je rentre, lentement, pour ne pas déranger la personne à l’intérieur, et tombe sur Kiritael, le prof d’histoire.

Il est jeune, le plus jeune des trois profs. Physiquement, il semble d’ailleurs avoir moins de vingt-cinq ans, et il arbore fièrement une longue chevelure blonde, bien que plus courte que celle de Karel, et un sourire amical. Je ne l’ai pas beaucoup parler hier, mais il semble plus amical et accueillant qu’Arkael, en tout cas.

Lorsqu’il me voie à l’entrée de la salle, il me fait un rapide signe de la main pour m’inviter à rentrer, et m’adresse un petit sourire, avant d’engager la conversation.

-Du mal à dormir ?

-Euh… Oui. Je ne peux pas m’empêcher de repenser à ce qui s’est passé hier soir. Et à ce qui est arrivé à mes amis.

Il me regarde d’un air songeur, puis se redresse de la tablette sur laquelle il était en train d’écrire, se lève et s’avance dans ma direction. Il me prends par les épaules, me regarde droit dans les yeux, et me répond.

-Oui. C’est une épreuve qui est toujours compliquée, le Changement. Même si je n’en suis pas un moi-même, j’ai rencontré nombre de Changeurs, et je sais à quel point cela peut représenter un choc. Et dans ton cas en particulier… Si ça peut te rassurer, je peux te dire une chose. Nous trouverons le coupable. Et il n’est pas chez nous. Justice sera faite. En attendant, je pense qu’il sera important pour toi de devenir plus fort. Tu as du potentiel. Crois en toi, et tu obtiendras la vengeance que tu réclames.

Je ne sais pas vraiment quoi répondre à ça. Après un dernier regard compatissant, l’ange retourne à sa place, et reprends son travail. J’aimerais le croire, mais je ne peux être sur de rien. Je décide de ne pas perdre plus de temps à ressasser ces questions dans ma tête, et je quitte la salle peu après.

Je passe les quelques heures, jusqu’au réveil de la maison, à m’entraîner. C’est assez fou à quel point je me suis vite habitué à la sensation du Flux. Je peux maintenant le sentir à plusieurs mètres de moi, et je sens aussi que le temps requis pour invoquer le seul sort que je connais, la prière blanche, se réduit de plus en plus. J’aimerais essayer d’autre choses, apprendre d’autres sorts, mais je ne saurais même pas par où commencer, et je ne veux pas déranger un des profs, pas avant de m’être intégré un peu plus.

Vers neuf heures, la vie reprend assez rapidement dans la maison. J’entends Valarion et Éliphaelle discuter en passant devant la salle dans laquelle je me suis installé, qui est un genre de petite salle de sport, avec des tapis de sol et les murs enveloppés de matériel similaire.

Je ne sors pas pour les saluer, voulant éviter une autre conversation désagréable avec eux, mais quelques minutes après leur passage, je me décide à sortir, pour aller voir les autres.

Je n’ai pas besoin de chercher longtemps pour les trouver. Antoine, Élise et Sekir discutent à trois dans le petit salon dans lequel je les ai rencontrés hier. Lorsqu’ils me voient, ils me saluent et m’invitent à les rejoindre.

-Eh, Nils, salut !

-Salut Sekir, Élise, Antoine.

Je les salue rapidement, et vais m’asseoir à côtés d’eux. Élise semble bien plus calme qu’hier, une bonne nuit de sommeil l’a clairement aidé.

-T’es prêt pour le cours de ce matin ?

-Quoi ? On a cours ? Ce matin ?

-Ouais, c’est pas plus simple que le lycée ici, on bosse aussi. Ce matin c’est science, jusqu’à midi.

Je jette un coup d’œil à ma montre. 9H17. Si je comprends bien, on a donc deux-heures et demi de cours tout les matins.

-Et cet après-midi ?

-Histoire. Ce sera un peu plus cool, Kiritael est vraiment plus sympa qu’Arkael.

C’est vrai qu’il a l’air plus sympa. Mais j’imagine que je pourrais en juger de moi-même ce soir.

-Et du coup, vous faites quoi en science ?

* * *

La réponse était rien de plus qu’au lycée, apparemment.

C’en est même surprenant, comment des êtres surnaturels peuvent partager les découvertes scientifiques de simples humains, comment est-ce possible que toutes les inventions humaines fonctionnent, si la magie existe ?

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En tout cas, Arkael est vraiment un mauvais prof. Il est ennuyant, se contente de nous faire recopier des cours qu’il a trouvé sur internet, et, surprenamment, surtout en sachant que je suis, si j’ai bien compris, de loin le plus jeune ici, j’ai de l’avance par rapport à eux en sciences. Ça me fera une matière de moins à réviser, au moins.

Kiritael est l’antithèse d’Arkael, il est attentionné, semble passionné de son sujet, et à passé l’heure à m’expliquer de nombreux détails qui me manque.

Sa matière, l’histoire semble structurée comme dans n’importe quel établissement scolaire, mais avec un niveau de lecture en plus, celui du conflit permanent entre démon et ange.

En moins de quelques heures de cours, j’ai ainsi appris comment l’empire romain a été pendant longtemps contrôlé par les anges, pourquoi des hordes barbares influencés par les clans de démons ont renversé Rome, comment les anges ont ensuite progressivement regagné de l’influence auprès de ces hordes pour les pousser à fonder des pays plus stable, et à propulser l’Europe dans le moyen-âge.

La matière semble aussi bien moins centré sur un pays qu’on pourrait s’y attendre. En moins de trois heures de cours, Kiritael a aussi longuement parlé de différents affrontements mineurs entre anges et démons partout dans le monde, du désert de Chine au jungles d’Afrique. Ce qui m’a permis de comprendre de plus en plus le côté global de ce conflit. C’est une guerre mondiale, qui dure depuis des millénaires. La courte trêve des dernières décades ne représente rien comparé aux siècles de conflit l’ayant précédé.

Vers quatre heures, nous avons finalement pu quitter la salle de classe. Valarion et Éliphaelle sont rapidement partis de leur côté sans un regard pour nous, et Antoine est allé se réfugier dans sa chambre après quelques mots. Je me suis donc une nouvelle fois retrouvé avec Sekir et Élise, ce qui n’est pas forcément pour me déplaire. Je commence vraiment à les apprécier, même si je ne les connais pas encore vraiment.

Cependant, avant que l’on ne se décide d’un endroit où aller, ou de quelque chose à faire, Karel fait une apparition inopinée et m’appelle.

-Nils. Tu peux venir avec moi quelques instants ?

-Euh, oui, pas de problème. Je vous suis, monsieur.

Je ne vois pas exactement pourquoi il voudrait me voir. À cause de ce qui s’est passé hier ? Mais dans ce cas, pourquoi maintenant et pas hier soir ? Je salue les deux autres, et suit le vieil ange dans les couloirs.

On se balade tout les deux pendant un certain temps, plus d’une dizaine de minutes, à travers les nombreux couloirs et escaliers de ce bâtiment. Honnêtement, c’est un vrai labyrinthe. J’ai repéré les salles les plus importantes, mais il y en a tellement plus, et je n’ai pas le moindre début d’idée sur leur utilité. Les anges contrôlent un building entier, au plein milieu d’un centre ville, et semble ne faire qu’héberger une demi-douzaine de personnes.

Qui s’occupe du bâtiments ? Peu importe la qualité de l’HI, l’intelligence artificielle gérant la maison, ou le nombre de robots aspirateurs, il y a toujours un besoin d’humains. Ou d’ange, du coup.

Sans avoir eu la réponse à ces nombreuses questions, il semblerait que nous soyons arriver à destination.

Karel s’est arrêté au fin fond d’un couloir, qui, si j’ai bien compté le nombre d’escaliers, doit se situer au sous-sol de l’immeuble. En face de lui, une porte, petite, métallique, purement mécanique. Pas d’ouvertures automatique, pas de serrure. Juste un gros morceau de métal avec une poignée.

Karel murmure quelques mots dans sa barbe, lève sa main et une grande lumière illumine soudainement les alentours, et surtout le battant de la porte. Celle-ci s’ouvre silencieusement, et Karel rentre dans la pièce. Sans hésiter, je lui emboîte le pas.

Et je me retrouve dans… une cave ? Une salle de taille moyenne, rectangulaire, dont les murs sont recouverts de boîtes en cartons de diverse taille, forme et couleur.

Une seule chose est commune à tout les cartons, et me rappelle, si j’en avais besoin, que ce n’est pas une simple cave. Tout les cartons brille d’une lumière dorée, si forts que même dans cette pièce sans fenêtres, aucun autre éclairage n’est nécessaire.

Karel jette un regard périphérique sur la pièce, sans doute pour vérifier si tout est encore là. Après ça, et un petit hochement de tête, il se retourne vers moi, et me pose une question.

-Alors, tu commence à t’habituer à la vie d’ange ?

Un peu décontenancé par sa question, sans rapport apparent avec la pièce remplie de boîtes fluorescentes, je lui réponds sans réfléchir.

-Euh, je m’habitue. C’est sympa. Je crois.

Je me sens un peu stupide pour ma réponse lacunaire, mais il ne semble pas en tenir compte.

-Bien. Tu t’es un peu habitué à la maîtrise du Flux, j’imagine ?

Au moment où il me dit ça, je me rends compte de ce qu’est vraiment cette pièce. La concentration de Flux ici est gigantesque, presque cinq fois, non, au mois huit fois supérieure au reste du building, et même de la ville, si ce que j’ai vu jusqu’à maintenant est représentatif.

L’énergie pure qui traverse la salle est impressionnante, mais ce qui l’est encore plus, c’est la magie que je peux voir, sous forme d’un assemblage de Flux structuré, formant d’étranges symboles recouvrant tout le sol. Je ne peux même pas commencer à comprendre ses effets, mais le fait que tout le Flux soit retenu uniquement dans la salle, et ne se déverse pas dans tout l’immeuble, est un indice assez clair.

Je regarde Karel, un peu choqué. Celui-ci sourit, visiblement ravi de m’avoir impressionné, ou peut-être du fait que je me sois rendu compte tout seul de la magie de cette pièce ?

-Tu commence à t’y faire, on dirait. Tu mérites quelques explications. Cette salle est sans doute une des plus importantes de tout le QG. Ici sont stockés des millénaires d’artefact, d’armes, d’armures, produites par les meilleurs forgerons Anges, Nains, et par les meilleurs Changeurs ayant jamais existé. Chacun des objets ici a une histoire, une origine, un effet. Tu es l’un des notre désormais, et d’autant plus après l’attaque d’hier. Tu peux donc prendre une de ces boîtes.

Quoi? Une réserve d’artefacts ? Mais pourquoi ? Pourquoi ne pas les utiliser ? Et il a bien dit Nain ?

Toutes ces questions traversent mon esprit en l’espace de quelques secondes, mais je finit par ne poser que la plus importante.

-Comment ça, une boîte ? N’importe laquelle ?

Il me sourit, toujours avec le même air amusé, et me réponds.

-N’importe laquelle. Certaines contiennent des armes surpuissantes, d’autres des armures incassables. Certaines ne contiennent que des petits réservoir de Flux, et n’ont qu’une utilité limité. Tu es libre, mais une fois que tu auras prit une boîte, ce sera terminé. C’est un choix important. Nous déplaçons la salle, la réorganisons plusieurs fois par siècle, mais tout les Anges passent un jour ici, ou dans une salle équivalente, ailleurs sur le globe. Fais ton choix.

Je dois bien choisir. C’est super important, peut-être le choix le plus important de ma vie jusqu’à maintenant. Et je n’ai aucune autre information que les boîtes en cartons, simples conteneurs.

Je devrais sans doute prendre une des plus grosses, en espérant qu’elle contienne une armure cheaté.

Je m’apprête à faire exactement ça, prendre une des grosses au hasard, lorsqu’une pensée me traverse l’esprit. En fait, je peux avoir une autre information.

Je ferme les yeux, me bouche les oreilles, et ne me concentre que sur ce sixième sens si nouveau pour moi, ma perception du Flux.

J’essaie d’ignorer le sort posé au sol, ce qui n’est pas évident au vu de sa taille et de sa puissance, et je ne me concentre que sur les boîtes. J’étudie les Flux qui en rentrent, les Flux qui en sortent.

Certaines attirent mon attention. Une semble attirer tout le Flux autour d’elle, et le relâcher en un point précis, créant un espace de courant de Flux. Une autre semble, au contraire, repousser le Flux tout autour d’elle. À l’intérieur de certaines, je ne peux pas voir ce que le Flux fait, et dans d’autres il décrit des parcours étranges et complexes, semblant dessiner des étranges formes lumineuse.

Je n’ai aucun moyen de décider entre toutes ces boîtes, et mes connaissances sont bien trop insuffisantes pour prendre le meilleur choix.

Je suis pris d’une inspiration soudaine, et, changeant de stratégie, je me concentre à nouveau sur le sol, espérant y voir une irrégularité, quelque chose, quoi que ce soit… oh ! Ici !

Dans un coin de la pièce, le sort semble déformé. Les motifs qui se répétaient parfaitement à l’identique jusqu’ici, sont là tordus, presque impossibles à reconnaître.

Je vais dans ce coin, et je tombe sur une toute petite boîte en carton, coincé entre deux grosses boîtes, dont celle qui semble repousser le Flux. Je suis quasiment sûr que c’est celle-ci qui cause les distorsions car elle est pile au centre de la zone dans laquelle celles-ci apparaissent.

Je prends cette boîte cubique, qui fait moins de dix centimètre de côté, et qui est emballé dans un carton marron assez standard, et je me retourne vers Karel. J’hésite un peu, mais je me décide à ne pas réfléchir plus longtemps. Je n’ai aucun moyen de trouver le meilleur choix, donc je vais simplement suivre mon instinct.

-Je prends celle-ci.