En cette agréable matinée ensoleillée, une douce chaleur berçait la métropole d’Ezora. Les oiseaux gazouillaient et la vie urbaine reprenait la trépidation que la nuit avait suspendue. Le centre-ville était plongé dans son usuelle cacophonie, pendant que les voitures s’amoncelaient sur les autoroutes. De leur côté, les étudiants avaient déserté les salles de classe et entamaient fièrement leurs vacances estivales. À ce stade, la journée subissait un démarrage des plus parfaits. De ce fait, personne ne pouvait se douter que l’ambiance serait différente au domicile de la famille Mitressey.
Tandis que les deux parents s’affairaient dans la cuisine, leur fille, pour sa part, était toujours clouée à son lit. De toute évidence, le royaume des rêves ne semblait pas vouloir la laisser partir, même si les rayons du soleil inondaient sa chambre de lumière. Néanmoins, l’adolescente avait une bonne explication à cette situation, puisqu’on pouvait apercevoir un contenant de somnifères sur sa table de chevet.
Heureusement, ce fut le son d’un réveille-matin qui l’extirpa de son profond sommeil. Par conséquent, Lolya se tourna sur le côté en bâillant, avant de s’étirer maladroitement le bras afin d’éteindre l’appareil. Après quoi, celle-ci se leva de son matelas pour empoigner un flacon de médicaments reposant à proximité. Lorsque cela fut fait, elle l’ouvrit et se versa une mystérieuse capsule rosée dans le creux de la main. Dans les secondes qui suivirent, celle-ci l’avala grâce à une bouteille d’eau et prit une grande inspiration. Curieusement, un sourire commençait à se dessiner sur son visage. Quelque chose était en préparation.
— Ça y est ! C’est aujourd’hui !
Un incroyable sentiment de joie venait de l’envahir. Par ailleurs, l’adolescente de quinze ans n’était plus capable de tenir en place. Son état la faisait sautiller avec exaltation. Dans la foulée, celle-ci s’avança donc vers sa penderie afin de prendre possession d’une valise, qu’elle remplit de vêtements et d’objets divers. Il est clair que son bonheur était associé à un imminent départ.
En second lieu, la citadine se rua hors de la pièce en direction de la salle de bain. Une douche s’imposait pour se débarrasser de l’odeur de sueur qui s’émanait de son corps. Heureusement, il ne s’écoula que dix minutes avant que le problème ne soit réglé. Par conséquent, elle délaissa le confort de l’eau chaude afin de pouvoir s’habiller. Son pyjama fut alors remplacé par un t-shirt violet, ainsi qu’un jean de couleur bleu. Après quoi, il était temps de faire sécher sa longue chevelure améthyste, qui lui arrivait au niveau des aisselles. Par la même occasion, celle-ci en profita pour se regarder le visage dans le miroir. De merveilleux yeux aux iris aubergine pouvaient y être observés. Toutefois, ces derniers arboraient encore quelques signes de fatigue.
Lorsque sa toilette fut terminée, la jeune fille récupéra sa valise à roulettes, puis rejoignit l’escalier menant au rez-de-chaussée. À présent, la prochaine étape constituait à se réunir avec le reste de la maisonnée. En cette occasion spéciale, le repas matinal serait plus agréable à déguster en leur compagnie. C’est ainsi qu’elle amorça donc sa descente, en essayant de ne pas perdre le contrôle de l’objet qu’elle traînait à ses côtés. Son contenu avait considérablement altéré son poids. De ce fait, Lolya peinait à la transporter. Par ailleurs, ses efforts engendraient un certain vacarme qui résonnait dans toute la résidence.
— Ma chérie, est-ce que tout va bien ? retenti soudainement une voix masculine.
— Oui, papa, répliqua la concernée. Je ne fais qu’emporter mes bagages jusqu’au vestibule.
Contre toute attente, cette réponse provoqua l’arrivée d’un homme dans la quarantaine. Son regard écarlate, agrémenté d’une paire de lunettes, affichait une expression d’inquiétude. De plus, un sourire nerveux dominait son visage. Celui-ci craignait grandement pour la sécurité de sa progéniture. N’importe qui aurait pu le remarquer.
— Tu ne devrais pas faire ça toute seule, mon cœur. Tu risques de te blesser. Va donc rejoindre ta mère pendant que je m’occupe de tout cela.
Un soupir ne put que quitter la bouche de son enfant. L’idée d’accomplir cette tâche sans assistance lui aurait octroyé un sentiment de fierté. Hélas, avec sa maigre force physique, une catastrophe pouvait survenir à tout moment. C’est pour cette raison qu’elle laissa Wyodrèd Mitressey lui prêter main-forte.
— En passant, je te souhaite un joyeux anniversaire, rajouta le quadragénaire en prenant possession de la valise verticale.
— Merci beaucoup, mon papounet d’amour.
Habituellement, l’attitude surprotectrice de son géniteur lui procurait une certaine forme d’agacement. Dans ces cas-là, l’adolescente se retenait de lui accorder trop d’affection. Par chance, en cette journée unique, elle lui fit part de sa gratitude avec un léger baiser sur une joue. Un geste qui ne passa pas inaperçu aux yeux du principal intéressé. Ses traits ne pouvaient plus maintenir une expression normale face à l’étonnement.
Après coup, la jeune fille de quinze ans parcourut les dernières marches aboutissant dans le couloir rattaché à la cuisine. Une forte odeur d’œufs et de bacon caressait ses narines. Un indice confirmant que quelqu’un y préparait de la nourriture. Lorsque la coupable apparut enfin dans son champ de vision, les salutations furent inévitables.
— Bon matin, maman !
La femme aux longs cheveux violets, agrémentés de mèches noires, répliqua à ces mots d’un signe de la main. De nombreux poêlons parsemaient le fourneau électrique et ceux-ci ne pouvaient nullement être laissés sans surveillance. Sans quoi, un imprévu était assuré.
— Joyeux anniversaire, ma puce. Est-ce que tu as bien dormi ?
— Oui, si l’on veut.
— Et as-tu pris ta médication ?
— Ne t’inquiète pas. Je l’ai fait en me levant.
— C’est bien. À présent, tu n’as qu’à aller t’asseoir. Le petit-déjeuner sera bientôt servi.
Lorsque ces paroles parvinrent à ses oreilles, Lolya s’avança vers la table à manger. Des assiettes, accompagnées de plusieurs ustensiles, y avaient été déposées. C’est ainsi que la jeune fille prit place sur l’une des chaises disposées aux quatre coins. Ses papilles gustatives étaient avides de savourer le délicieux brunch qui avait été confectionné.
— Je n’en reviens toujours pas ! se réjouit-elle en agitant les mains. Nous sommes sur le point de partir pour le Walt Disney World Resort en vue d’y passer tout l’été !
En entendant cela, Kira Mitressey se contenta d’esquisser un sourire. Son mari et elle lui avaient offert de séjourner audit parc d’attractions pour célébrer ses quinze ans. En revanche, pour s’y rendre depuis Ezora, un trajet en avion était nécessaire. À l’heure actuelle, il ne restait plus qu’à patienter jusqu’à la venue du taxi, qui devait arriver aux alentours de midi. Cela évitait au couple de prendre la voiture familiale et de la laisser sans surveillance dans le stationnement de l’aéroport.
Au même instant, le père s’engagea dans la pièce. Il avait terminé le déplacement des bagages jusqu’aux abords de la porte d’entrée. Tout comme l’adolescente, celui-ci avait hâte de déguster le repas préparé par sa douce moitié. L’affamé s’installa donc à sa chaise habituelle en attendant le début du service.
Il ne s’écoula qu’un certain nombre de secondes avant que Kira ne commence ses allées et venues pour déposer la nourriture au creux des assiettes de la maisonnée. Qui plus est, cette dernière versa du café dans la tasse de son époux, tandis que son enfant bénéficia d’un chocolat chaud recouvert de crème fouettée. L’engloutissement des aliments se déroula dans la joie. Chacun abordait un sujet de conversation qui captivait l’intérêt du reste de la tablée. C’était l’activité empêchant le silence de s’implanter. Cela permettait aussi de passer le temps. À mesure que les aiguilles de l’horloge tournaient, le cœur de Lolya battait graduellement au rythme de l’excitation.
Chaque bouchée était autant délicieuse que la précédente. Tout avait été cuit à la perfection selon les préférences de chacun. De toute évidence, la mère aux yeux violâtre possédait un véritable talent culinaire. L’unique inconvénient était qu’il ne s’était pas transmis à sa fille adorée. Cela aurait constitué un avantage, étant donné l’absence quotidienne des deux parents à cause de leur travail. Par chance, ceux-ci bénéficiaient de congés pour la période estivale. Leur progéniture n’aurait donc pas à se nourrir de repas surgelés.
Finalement, le petit-déjeuner s’acheva aux alentours de onze heures. Par conséquent, c’est avec le ventre rassasié que le trio migra vers le salon. Leur moyen de transport était sur le point d’arriver et le meilleur endroit pour l’apercevoir était à travers les fenêtres de la pièce, qui donnaient sur le stationnement. Kira et Wyodrèd s’installèrent alors sur le canapé, pendant que leur adolescente faisait les cent pas. Toutefois, quelque chose bouscula amèrement le cours de la situation.
— Je crois que le moment est venu de le lui annoncer, commença soudainement la femme de quarante ans tout en se tournant vers son mari.
Étrangement, celui-ci répliqua à l’aide d’un regard anxieux. Par ailleurs, cette réaction n’échappa pas à la concernée. Tout en haussant les sourcils, Lolya se plaçant devant ses parents avant de déclarer :
— M’annoncer quoi au juste ?
D’un geste tremblotant, l’homme passa la main dans sa chevelure cramoisie. Contre toute attente, les mots qui quittèrent ses lèvres furent une série d’excuses, ainsi que des remords.
— Je suis sincèrement désolé, ma chérie. Ce plan de voyage était l’idée de ta mère afin d’éviter que tu ne sois angoissée. Hélas, elle n’a pas voulu m’écouter quand j’ai essayé de la raisonner. J’aurai aimé que cela se déroule autrement. Tu ne mérites pas de subir cela pour ton quinzième anniversaire.
À la suite de cet aveu, son épouse enchaîna avec l’explication dudit mystère. En revanche, cela fût quelque chose à laquelle personne ne pouvait rester indifférent. Une vérité qui résonna avec douleur entre les murs du salon :
— En fait, nous n’allons pas au Walt Disney World Resort.
Ces mots eurent l’effet d’une gifle. La gaieté sur le visage de Lolya se transforma en déception. Elle avait attendu l’arrivée de cette date avec impatience, puis c’est avec aigreur que tout venait de s’écrouler.
— Quoi ? J’espère que c’est une blague !
Si seulement cela avait pu en être une. Malheureusement, les deux parents ripostèrent grâce à de légers mouvements de la tête. Ce signe de négation broya alors la partie de son cœur qui souhaitait toujours y croire.
— Je sais que c’est difficile à avaler, ma puce. Néanmoins, nous n’avions pas d’autres solutions.
Prise de panique, la jeune fille se précipita dans le vestibule. Hélas, la réalité la rattrapa avec froideur. En touchant les valises de ses procréateurs, celle-ci remarqua qu’elles ne contenaient absolument rien. Ces dernières ne constituaient qu’une simple illusion pour ne pas éveiller les soupçons sur cet effroyable mensonge. Dès lors, le désappointement se transforma en tristesse, avant de faire place à un tourbillon de colère. Il est clair que l’adolescente aux cheveux violets n’allait pas rester les bras croisés.
— Comment avez-vous pu me faire une chose pareille ? s’exclama celle-ci en revenant à l’emplacement initiale. J’ai patienté durant des semaines en vue de cette sortie !
— Je sais, ma chérie, s’immisça Wyodrèd en se mordillant les lèvres sous l’emprise de la honte.
Noyée dans un mélange d’émotions variées, la principale intéressée ignorait comment répliquer. Son corps oscillait entre crier de rage ou pleurer un interminable flot de larmes. Dans une telle situation, l’unique solution à envisager fut de prendre une grande inspiration. C’est la technique que lui avait conseillée son psychologue.
— Calme-toi, poursuivit, pour sa part, la femme dans la quarantaine. Tout n’est pas totalement perdu. Nous avons juste inventé cette histoire afin de te préparer mentalement à affronter ta véritable destination.
L’atmosphère changea à la prononciation de cette série de phrases. De quoi pouvait bien parler Kira ? La simple annonce de l’annulation du séjour tant anticipé ne suffisait pas à implanter davantage la confusion.
— Pardon, mais qu’est-ce que tu sous-entends par ça ?
— Eh, bien. Il a plutôt été décidé de t’envoyer dans… euh… dans un…
Ironiquement, la mère semblait deux fois plus nerveuse. Comme si cette dernière appréhendait une réaction encore pire que celle que son enfant venait de manifester.
— Pendant que ton père et moi resterons ici, tu devras aller passer la saison estivale dans un… un… un camp de vacances.
Ce fut la goutte qui fit déborder le vase. Pour une raison bien précise, Lolya Mitressey commença à hyperventiler. D’horribles souvenirs lui revenaient en mémoire. En outre, la pauvre dut s’asseoir, car ses jambes peinaient à la maintenir debout. C’est alors que le couple lui apporta son soutien. La détresse que la malheureuse démontrait était parmi les plus difficiles à observer.
— Pourquoi ? s’exaspéra la jeune fille aux yeux violacés en s’agrippant la tête. Je vous rappelle que c’est à cause d’un camp de vacances que je dois prendre tous ces médicaments !
— Je suis sincèrement désolé, ma belle. Ce choix ne nous appartenait pas. C’est leur administration qui a exigé ta présence. De toute manière, on leur a fait part de ce que tu as subi et ils nous ont assuré que quelqu’un s’occupera de toi.
— Je… je… j’ai besoin d’un verre d’eau.
Cette requête fut aussitôt consentie par le père. D’un pas hâtif, il se dirigea vers la cuisine, puis revint avec un contenant rempli du précieux liquide incolore. Avec des doigts tremblotants, la demanderesse s’y abreuva avec difficulté. Par chance, cette action sembla la calmer. Sa respiration redevint naturelle. Ensuite, un long et profond soupir quitta sa bouche désaltérée.
— Je crois que j’aurais mieux digéré que notre voyage soit annulé et que je sois contrainte de passer le reste des vacances à la maison.
Le sarcasme employé dans cette réplique provoqua l’apparition d’un sourire sur le visage de Kira Mitressey. Hélas, la femme ne pouvait rien faire pour arranger la situation.
— Si nous avions eu le choix, cela se serait déroulé autrement. Tu peux en être certaine. Cependant, je suis sûre que tu t’amuseras et que tu te feras de nouveaux amis. Ce qui est survenu il y a quatre ans ne se reproduira jamais. Tout cela est derrière toi à présent.
L’adolescente aurait voulu faire part de son opinion. Malgré cela, la discussion avait fait en sorte que le temps s’était écoulé plus rapidement. Douze sonorités s’émanèrent de l’horloge de parquet installée dans la pièce. Il était dorénavant midi. Au même instant, une mystérieuse fourgonnette noire s’engagea dans l’aire de stationnement de la résidence.
— Oh, je crois que ton transport est arrivé.
Depuis la fenêtre, une femme en tenue foncée quitta aussitôt le véhicule. Les lunettes de soleil garnissant son visage lui donnaient une allure intrigante. De cette vision, la jeune citadine aux yeux violets ne fut que très peu rassurée à mesure qu’elle se rapprochait de la porte d’entrée.
Trois coups ne purent que retentir et les deux époux se levèrent en vue d’accueillir leur nouvelle invitée. Dès lors, au moment où leurs regards se croisèrent, l’étrange conductrice se contenta d’émettre avec un ton monotone :
— Bonjour, monsieur et madame Mitressey. Est-ce que votre fille est prête ?
En prenant conscience que l’on parlait d’elle, la concernée s’avança timidement vers le vestibule, puis se plaça derrière sa mère. Cela lui procurait une certaine forme de protection qui la réconfortait face à la situation.
— Je suis là, déglutit-elle.
— Parfait. Dans ce cas, mettons-nous en route. Tu n’as qu’à me dire laquelle est ta valise et j’irai l’installer dans la voiture.
À la suite de cette requête, Lolya pointa du doigt l’objet qui arborait une vive teinte pourprée. De cette clarification, la femme l’empoigna solidement par le manche, avant de retourner vers son moyen de transport. La scène semblait irréelle. Dès lors, la future passagère ne put que regarder ses parents.
— Dans quel genre de camp m’envoyez-vous au juste ?
Malheureusement, avant même d’obtenir une explication, la conductrice lui ordonna de se dépêcher. La vacancière enfila donc ses souliers et la petite famille s’échangea une série d’accolades. Ils ne se côtoieraient plus pendant un long moment.
— Je te souhaite un agréable séjour, mon chaton. J’espère que tu nous le présenteras quand tu reviendras.
Les retombées furent immédiates. De la confusion venait d’apparaître sur le visage de l’adolescente. Cette dernière ne comprenait pas le sens de cette phrase, qui avait été émise par la quarantenaire aux iris améthyste. Hélas, tout ce qu’elle pouvait faire était de marcher vers le véhicule. Lorsque la portière latérale fut ouverte, la silhouette de trois autres occupants se fit entrevoir. Ceux-ci semblaient être dans une tranche d’âge similaire. Toutefois, au moment où Lolya monta à bord, leurs têtes se tournèrent dans sa direction et la rendirent mal à l’aise.
— Bonjour, lui lança joyeusement une fille aux cheveux bruns et aux yeux verts.
— Salut, répliqua faiblement son allocutaire en prenant place sur l’unique siège qui demeurait toujours vacant.
Après avoir bouclé sa ceinture de sécurité, la citadine soupira. L’infortunée sentait l’anxiété lui retourner l’estomac. Il fallait puiser du courage, car ce n’était plus le moment de faire marche arrière. Pendant ce temps, l’étrange adulte aux lunettes de soleil, qui avait réintégré l’habitacle, démarra le moteur.
— Je vous préviens. Le trajet devrait durer au moins deux heures. Nous ne ferons pas d’arrêts, sauf si l’un d’entre vous doit impérativement se rendre aux toilettes.
Le quatuor n’émit aucun commentaire par rapport à cet avertissement. Ses membres pouvaient attendre d’être arrivés à destination. Dans la foulée, la fourgonnette commença à se mouvoir, puis le quartier résidentiel se transforma en autoroute. Un lourd inconfort berçait l’atmosphère. Dans une tentative pour l’enrayer, la brunette se retourna aussitôt vers sa voisine de derrière.
— Je suppose que tes parents ne t’ont pas donné de précisions à propos du camp de vacances dans lequel nous nous dirigeons.
Une longue expiration quitta la bouche de son interlocutrice. De toute évidence, cette dernière n’était pas la seule à nager dans l’incompréhension. C’était le moment d’échanger des informations afin d’analyser la situation. Qui plus est, cela lui permettrait de nouer des relations.
— Non. Ils m’ont juste fait croire qu’on irait au parc Disney pour ensuite me balancer en pleine figure que c’était un mensonge.
— Wow ! lâcha sa destinataire, étonnée. C’est assez cruel de faire ça. Je compatis.
Soudainement, au moment où la jeune fille de quinze ans allait ajouter autre chose, le garçon qui se trouvait à gauche de sa camarade commença à rire de façon amusée. Ses traits physiques indiquaient qu’ils avaient un lien de parenté, puisqu’il possédait la même coloration des cheveux, ainsi que des yeux.
— Ha, ha, ha ! C’est pour les enfants les parcs Disney. À ton âge, j’aurais honte d’être attiré par un endroit pareil.
Contre toute attente, sa sœur jumelle lui assena une violente claque derrière la tête. Cet acte gratuit ne plut guère au passager de seize ans. Il refusait de l’accepter, car la douleur peinait à se dissiper. De ce fait, il extériorisa ses sentiments avec irritation.
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— Aïe ! Ça fait un mal de chien ! Peux-tu m’expliquer pourquoi tu viens de faire cela, espèce de crapaud ?
— La ferme, gros crétin ! Tu devrais prendre le temps de réfléchir avant d’ouvrir ton clapet ! Tu sauras qu’il n’y a pas de limite d’âge pour aller s’amuser dans les parcs Disney !
L’adolescent se contenta de lever les yeux au ciel, avant de grimacer. Ce dernier demeurait indifférent aux propos qui avaient été lancés à son égard. Ensuite, la conversation se poursuivit entre les deux amies comme si de rien n’était.
— Pardonne l’attitude de mon frère. Il adore dire des conneries.
C’est alors qu’une main fut tendue devant la vacancière au regard aubergine dans le but d’enclencher les présentations.
— Je m’appelle Élie Helsing en passant.
— Lolya Mitressey, balbutia la principale intéressée en lui serrant la paume.
— Et lui, c’est Yuka, ajouta Élie en pinçant la joue de son jumeau en guise de taquinerie.
Après quoi, Lolya tourna la tête vers son propre voisin de gauche, qui arborait une chevelure mi-longue blonde et des lunettes rehaussant des iris brunâtres. Curieusement, il ne prêtait aucune attention à son entourage et admirait le paysage défilant à travers la vitre teintée.
— Il avait l’air d’être dans son monde alors on a décidé de le laisser tranquille, précisa la deuxième fille du groupe à voix basse. Il était déjà à bord quand on est montés dans cette voiture.
— Thomas Charleroi, répliqua subitement le jeune homme de dix-sept ans.
En s’apercevant qu’on l’avait entendue malgré son faible volume, Élie ne put se retenir d’exhiber un regard surpris. En revanche, avant même de pouvoir prononcer quoi que ce soit, Thomas retourna à sa précédente activité. Il ne souhaitait aucunement être impliqué dans cette socialisation improvisée. Les trois autres se contentèrent donc de satisfaire ce désir. Par la suite, la discussion reprit entre eux afin d’élaborer des hypothèses sur leur mystérieuse destination :
— Et vous, demanda l’Ezoroise de quinze ans à l’intention des jumeaux. Qu’est-ce que vos parents vous ont raconté ?
— Pas grand-chose, se plaignit la fille aux yeux émeraude en ajustant les bretelles de sa robe blanchâtre. À partir du moment où l’école s’est terminée, ils nous tapaient sur les nerfs en nous rappelant qu’on passerait l’été dans un endroit fantastique. Quand on exigeait plus de détails, ils nous expliquaient que c’était un camp de vacances sélectif et qu’on était chanceux d’y aller.
— Je vois.
Tout à coup, Yuka ajouta son grain de sel à la réponse de sa sœur. Ses traits faciaux adoptèrent une forme effrayante, puis il leva les deux mains dans le but d’imiter un animal qui exposait ses pattes griffues.
— On ne sait jamais. C’est peut-être juste une couverture. Il s’agit probablement d’un projet gouvernemental ultra-secret consistant à envoyer de pauvres adolescents sans défense dans un laboratoire afin d’y être transformé en monstres.
À la simple prononciation de ces mots, le jeune homme se reprit un autre coup en arrière du crâne. Quand Élie n’aimait pas ses propos, elle ne se retenait pas pour punir son compagnon de domicile en faisant usage de la violence.
— Ouille ! Ça ne va pas bien dans ton cerveau de néandertalienne ! Tu as fini de me donner des baffes !
— C’est plutôt toi qui devrais consulter ! Je n’ai jamais entendu quelque chose d’aussi ridicule !
Pour sa part, leur congénère à la chevelure violacée émit un petit rire tendu. La situation dont elle était spectatrice la rendait embarrassée. En tant qu’enfant unique, elle ne savait pas comment interpréter cette relation fraternelle. Contre toute attente, leur échange alla même jusqu’à faire réagir le garçon à lunettes. Cette supposition farfelue lui octroya une expression d’énervement. Dès lors, il quitta sa tranquillité pour établir un contact visuel avec son confrère de périple.
— C’est censé être drôle ? déclara-t-il d’une voix remplie de froideur.
— Euh, ouais.
— Dans ce cas, je crois que le silence ne te ferait pas de mal.
Aucune intention comique ne se trouvait dans cette réplique. Toutefois, Élie s’esclaffa à la suite de celle-ci. Un geste qui engendra un petit sourire en coin sur les lèvres de Thomas.
— Ha, ha, ha, ha, ha ! Tu vois, frérot ! Lui non plus n’est pas capable de te supporter !
Le principal intéressé se mit alors à bouder. Son corps riposta avec un croisement des bras, tout en manifestant son désagrément vis-à-vis l’attitude des autres passagers du véhicule.
— Pff, vous êtes juste inapte à saisir l’ampleur de mon fabuleux génie humoristique.
Pour une troisième fois d’affilée, le malheureux eut droit à une claque derrière la tête. À ce stade, la seule solution à envisager pour bénéficier de la sérénité était d’acquiescer à la précédente demande. Sous un grommellement agacé., Yuka fouilla donc dans ses poches pour en sortir son téléphone intelligent. Il ne s’écoula que très peu de secondes avant qu’il n’insère les écouteurs qui y étaient enroulés dans ses canaux auditifs. Dorénavant, le son de sa musique favorite lui tiendrait compagnie.
Durant les heures qui suivirent, la conversation reprit en enchaînant diverses opinions, ainsi que des questions. À certains moments, la conductrice fut même interpellée dans le but de fournir des renseignements. Malheureusement, cette dernière préférait demeurer silencieuse. Il est clair que le groupe de quatre n’obtiendrait des réponses qu’une fois arrivé à destination.
Cela faisait longtemps que la ville avait fait place à la forêt. L’autoroute passait au milieu d’un immense parc national. En parcourant sa surface bitumineuse, on pouvait se rendre jusqu’à Arcadia, la métropole voisine. Néanmoins, ce n’était pas l’objectif du mystérieux voyage. Sans crier gare, la fourgonnette commença à ralentir. Dès lors, elle s’engagea sur un chemin terreux qui s’enfonçait dans la gigantesque mer de conifères. De l’incompréhension s’empara alors des adolescents.
— Excusez-moi, s’interposa Élie en observant les alentours. Pourquoi avez-vous quitté la voie principale ? À ma connaissance, il n’y a rien qui a été construit dans cette zone.
Comme toujours, la femme aux lunettes fumées se contenta de garder son mutisme. Les vacanciers s’échangèrent donc une série de regards inquiets. La moindre des choses à faire pour les rassurer aurait été d’ouvrir la bouche et d’expliquer la raison de ce changement de direction.
Brusquement, la confusion atteignit son paroxysme lorsque le relief d’une immense paroi rocheuse se dessina à l’horizon. Le chemin semblait s’arrêter net à son pied. De ce fait, il n’était plus possible de continuer. La conductrice immobilisa aussitôt son moyen de transport afin d’éviter une collision, puis fouilla dans les poches de ses vêtements noirs à la recherche de quelque chose. Un téléphone finit par en être extirpé. Par la suite, un échange survint.
— Salut, c’est moi. Je suis présentement devant le portail. Est-ce que tu peux me laisser entrer ?
Sans prendre le temps d’obtenir une confirmation de la part de son correspondant, l’adulte dans la vingtaine raccrocha la ligne de façon prompte. Celle-ci rangea ensuite l’appareil dans ses habits. Ladite demande intriguait considérablement les passagers. Une dizaine de secondes s’écoulèrent et ce qui vint après défia tous les scénarios envisageables. Un curieux craquement retentit et une partie de la falaise s’écroula pour dévoiler un tunnel qui était plongé dans une pénombre sans fin.
— Mais qu’est-ce que…
Le spectacle qui s’était déroulé octroya de grands yeux ronds aux quatre adolescents. Thomas en perdit l’envie de regarder le paysage et son attention bifurqua devant lui. Yuka, quant à lui, libéra ses oreilles de l’emprise musicale et un sourire narquois domina son visage.
— Oh, oh, oh ! On dirait que ma théorie de laboratoire secret se concrétise !
Pour une quatrième fois, après avoir ouvert la bouche, le jeune homme reçut un coup de la part d’Élie. Étrangement, son intensité était amoindrie, comparée aux autres. Cela était hors du commun.
— Arrête, Yuka ! J’ai de la misère à l’admettre, mais tu commences à me faire peur !
À l’évidence, la fille à la longue chevelure brune ne pouvait pas rester indifférente face à ce qui s’était passé. L’éboulement semblait avoir été déclenché délibérément, en faisant en sorte que le chemin soit épargné en vue de faciliter l’accès du véhicule.
— Qu’est-ce qui vient de se produire ? s’étonna à son tour Lolya. On aurait dit un truc sorti tout droit d’Harry Potter.
Pour la toute première fois, leur chauffeuse ne put se retenir d’émettre un petit rire jovial en entendant ses mots. Après quoi, cette dernière sauta sur l’occasion de faire une remarque personnelle.
— Ne vous en faites pas, les jeunes. Moi aussi, quand j’avais votre âge, j’ai réagi de cette manière en arrivant ici. Je ne peux pas trop vous gâcher la surprise, car c’est la directrice qui vous expliquera le concept du camp. Néanmoins, vous risquez de passer un agréable moment sur notre domaine.
Après avoir actionné le levier de vitesses, la concernée engagea la fourgonnette à l’intérieur du tunnel sombre. Personne ne put savoir combien de minutes s’écoulèrent durant sa traversée, puisque l’absence de visibilité avait dissipé la majorité des points de repère. Seuls les phares permettaient à la voiture de se mouvoir sans accrocher les parois de l’infrastructure naturelle. Hélas, leur faible rayon ne couvrait pas assez de territoire. C’était comme si l’endroit s’étendait à l’infini. Ultimement, la sortie apparue après ce qui sembla être une éternité. En regagnant la lumière du soleil, le groupe fut accueilli par un somptueux stationnement. Ses contours boisés et ses aménagements floraux embellissaient le paysage. Dans l’immédiat, la conductrice gara donc son véhicule, puis arrêta le moteur.
— Ça y est. Tout le monde descend.
En prenant connaissance de cet ordre, les quatre vacanciers détachèrent leurs ceintures. Après l’ouverture de la porte latérale, Lolya fut la première à poser les pieds à terre, suivi de ses amis. Le quatuor se déplaça alors à l’arrière, où la femme les rejoignit. Plus tard, les bagages se trouvant à bord réintégrèrent les mains de leurs propriétaires.
— OK, reprit la vingtenaire en refermant les accès de sa fourgonnette. Vous allez emprunter cette arche et poursuivre jusqu’à apercevoir l’employée qui s’occupe de l’accueil. Elle se chargera de vous montrer la voie vers la cérémonie de présentation.
En émettant des remerciements, les adolescents se mirent en route vers leur nouvel objectif. Yuka s’élança en courant, tandis qu’Élie le pourchassait en lui criant de ralentir. De leur côté, Lolya et Thomas restèrent en retrait. Ils préféraient jouer la carte de la prudence. Malheureusement, la valise de la principale intéressée faisait en sorte que ses pas étaient alanguis. Même en ayant des roulettes, l’objet avait de la difficulté à être tiré. Cependant, la situation n’était pas aussi dramatique que la suivante. Alors qu’elle marchait, son pied gauche heurta une pierre et son équilibre fut chamboulé. Son corps commença à basculer vers l’avant, en vue d’entrer en contact avec le sol. Par chance, son bras fut attrapé à la dernière minute par son compagnon à lunettes. La chute venait d’être évitée.
— Fais attention à ne pas tomber. Si tu as besoin d’aide, tu n’as qu’à me le demander.
Lolya était stupéfaite. Malgré l’attitude distante que son voisin avait démontrée durant le trajet routier, celui-ci semblait gentil. Toutefois, la timidité lui clouait les lèvres en place et elle se contenta de lui faire un signe de la tête pour manifester son refus. Elle voulait affronter cette difficulté par elle-même. Après tout, ses parents n’étaient plus là pour la protéger et de nombreuses épreuves l’attendaient. La peur des camps de vacances n’était pas la seule chose qui devait être surmontée. Sur le coup, Thomas accepta cette décision. À présent, il devança la jeune fille afin de la laisser se débrouiller, avant de s’éloigner comme tous les autres.
L’arche en question surplomba bientôt la silhouette de l’estivalière de quinze ans. Son architecture rappelait celle des peuples amérindiens, avec une série de colorations verdâtres, grisâtres, rougeâtres et bleutées. Qui plus est, le nom des lieux était gravé à son sommet dans un charmant style graphique.
— Le camp Éléments, s’interrogea l’intriguée en l’examinant des yeux.
Lolya marcha ensuite sur le sentier qui y était connecté. Une myriade d’arbres garnissait ses bords et la fraîche odeur forestière lui berçait les narines. À la base, son atmosphère préférée était celle de la ville, mais ce changement d’air n’était pas déplaisant. Seules les mauvaises expériences du passé gâchaient sa perception des choses. Son rythme cardiaque atteignait un niveau élevé. Une partie de son corps souhaitait à tout prix réintégrer le confort de son domicile, pendant que l’autre désirait avoir le courage d’agir comme le commun des mortels.
Au bout d’une vingtaine de mètres, le chemin déboucha sur un espace à ciel ouvert. Plusieurs bâtiments en bois s’y trouvaient. De plus, une femme patientait à une table installée à proximité. Ça devait être la monitrice chargée des nouveaux arrivants. De façon gênée, la jeune fille s’avança alors vers celle-ci.
— Bienvenue au camp Éléments, charmante demoiselle. Puis-je connaître ton nom, s’il te plaît ?
— Euh, je m’appelle Lolya Mitressey.
— Lolya, Lolya, Lolya, répéta l’employée en fouillant dans la pile de grandes enveloppes brunes qui traînait sur son bureau. Ah ! Te voilà !
La salariée lui tendit aussitôt l’une d’elles. En se basant sur son poids, on pouvait conclure que plusieurs documents occupaient l’intérieur. Dès lors, son allocutaire désigna la construction qui se trouvait à sa droite.
— Ça, c’est le pavillon d’accueil. Tu n’as qu’à y aller et y patienter. La directrice Greenwood devrait débuter son discours d’une minute à l’autre.
— D’accord. Merci beaucoup, madame.
Armée du manche de sa valise pourpre, la citadine commença à gravir la rampe permettant d’accéder aux portes d’entrée. Une pléthore de voix pouvait déjà se faire entendre à mesure qu’elle se rapprochait. Il est clair qu’un nombre important d’adolescents s’y était réfugié. Les rassemblements n’étaient pas son point fort. Conséquemment, Lolya prit une profonde inspiration, puis pénétra dans le bâtiment en refoulant son stress. Une fois arrivée à l’intérieur, celle-ci remarqua que l’unique pièce était aussi grande qu’un gymnase. La mobilité était donc à un degré acceptable, compte tenu du groupe de quarante personnes s’y étant réuni. Dans la foulée, elle aperçut les jumeaux Helsing et décida de se joindre à eux.
— Salut. Est-ce que ça vous embêterait si je reste avec vous ?
— Pas du tout ! s’exclama joyeusement Élie en lui posant la main sur l’épaule. Ça me changera les idées. J’en avais marre d’entendre la voix de mon frère.
— Hé ! s’écria ce dernier, insulté.
Un gloussement étouffé s’émana de leur amie au regard améthyste. Elle ne savait pas quoi faire d’autre pour éviter le malaise. Au même instant, le son amplifié d’un raclement de gorge retentit. Une femme à la longue chevelure rousse et aux yeux verts venait d’utiliser le microphone de la scène qui était aménagée dans la salle.
— Ahem. Puis-je obtenir le silence, je vous prie ?
À la simple prononciation de cette phrase, la cacophonie s’estompa. Le calme était devenu l’unique maître des lieux. L’assistance aurait pu entendre une mouche se pavaner dans les airs. La directrice était fière de l’aboutissement de son plan. De ce fait, elle s’adressa de nouveau à son public avec un caractère confiant :
— Je vous remercie. Pour commencer cette cérémonie d’ouverture en beauté, je tiens à me présenter. Mon nom est Élisabeth Greenwood et je suis la responsable de ce camp de vacances.
Une courte introduction résulta de cette déclaration. L’animatrice expliqua comment sa famille gérait l’établissement depuis plusieurs générations. De plus, celle-ci énuméra une liste d’activité proposée à l’intérieur des différents pavillons qui étaient éparpillés sur le domaine.
— Des chalets sont également à votre disposition afin de vous loger. Je donnerai les détails de leur attribution un peu plus tard. Je souhaite simplement vous préciser qu’ils sont mixtes, donc j’espère que vous y serez mature et décent.
— Eh, eh ! pensa aussitôt Yuka en agitant les sourcils. Ça veut dire que j’aurai la possibilité de passé du bon temps avec de jolies filles !
Au même moment, une main féminine lui frappa l’arrière du crâne avec force. Le garçon de seize ans plissa alors les yeux, avant de regarder sa sœur jumelle avec une pointe de lassitude sur le visage.
— Qu’est-ce qui te prend ? Je n’ai pas parlé !
— Non, mais c’était facile de deviner ce que tu avais en tête.
Un juron ne put qu’être émis par le concerné, puis sa concentration retourna envers la présentatrice. Le discours dura ainsi pendant de longues minutes jusqu’à ce qu’il finisse par adopter un virage particulier.
— Maintenant, je ne passerai pas par quatre chemins. Je le vois sur vos figures. Une bonne majorité d’entre vous est encore incertaine de la raison pour laquelle nous avons exigé votre présence. Certains ont d’ailleurs pu expérimenter quelques mises en scène loufoques de la part de leurs parents.
Ces mots firent immédiatement soupirer Lolya. Le terme ne se qualifiait guère pour décrire sa situation, puisque la malheureuse était plutôt victime d’une duperie. La blessure causée par l’annulation de son voyage au Walt Disney World Resort ne guérirait pas avant plusieurs semaines. Le moment était enfin venu d’obtenir des réponses. Son regard aubergine fixait intensément la personne qui allait dévoiler la vérité.
— Vous pouvez déjà vous en douter après avoir observé notre tunnel souterrain, mais le camp Éléments est un endroit particulier. Aujourd’hui, si vous vous dressez devant moi, ce n’est pas pour rien. Laissez-moi vous faire une démonstration.
D’un geste lent, la trentenaire leva la main à la hauteur de son nez. Ensuite, elle plaça l’autre en dessous pour que ses paumes puissent se faire face. En fermant doucement les paupières, celle-ci prit alors une grande inspiration. Au début, cela ne se remarqua pas, mais quelque chose commença à se former dans l’espace qui était situé entre les deux. Plus les secondes s’écoulaient et plus le phénomène devenait perceptible. Des cailloux et du sable venaient d’y apparaître. Ils lévitaient comme par magie et l’audience y réagissait avec étonnement.
— Depuis mon adolescence, j’ai développé la capacité de contrôler ce qui se rapporte à la terre, expliqua la directrice. Si vous êtes ici, c’est parce que vous possédez un pouvoir comparable au mien.
Tout à coup, Élisabeth éloigna ses mains. L’une allant vers la droite, pendant que l’autre se déplaçait vers la gauche. Le filet rocheux semblait suivre leurs mouvements dans une chorégraphie des plus exquises. En revanche le spectacle toucha bientôt à sa fin. L’amas s’évapora en ne laissant aucune trace. Dès lors, une diapositive prit forme sur la toile de projection qui était située derrière elle.
— Il existe quatre types élémentaires. Ces derniers sont la terre, l’air, le feu et l’eau. Si vous examinez l’enveloppe que ma collègue vous a remise dehors, vous pourrez connaître votre affiliation. Référez-vous à cette image pour mieux l’identifier :
image [https://i.ibb.co/f1M2xmx/4-elements.png]
La riposte du groupe fut instantanée. Le bruit de papier déchiré annihila toutes les autres sonorités. Quarante individus venaient d’ouvrir leurs enveloppes au même moment. Après coup, des voix estomaquées s’élevèrent, à l’inverse d’une minorité qui préférait démontrer du dégoût. Lolya Mitressey ne fut point épargnée. En soulevant délicatement le rebord de la sienne, la citadine extirpa la première feuille du lot dans un geste tremblotant. Elle ne parvenait pas à croire que tout cela était réel. Le symbole imprimé à sa surface arborait une coloration et des lignes reconnaissables. En se basant sur les pictogrammes de mademoiselle Greenwood, l’élément qu’elle pouvait supposément maîtriser était : l’eau.
— La terre ! s’immisça alors le garçon de la famille Helsing. Qui a osé m’attribuer cette merde ? Tout le monde sait qu’avec mon corps de dieu et ma personnalité flamboyante que le feu aurait été plus approprié !
— La ferme ! s’écria Élie en lui assenant la claque habituelle. Tu ne devrais pas te plaindre ! As-tu conscience des événements exceptionnels qui se produisent autour de toi ? Moi, je suis associée à l’air et j’en suis totalement bouche bée ! Tout cela est pratiquement impossible ! C’est un véritable rêve !
— C’est moi qui ai obtenu le feu, retentit subitement une voix derrière eux.
Thomas Charleroi venait de rejoindre le trio en exhibant une feuille où figurait un symbole rougeâtre. À première vue, la révélation le rendait inexpressif. Cela dit, il cachait un sentiment de fierté qu’il préférait garder pour lui. À partir de cet instant, l’imaginaire s’était assimilé à la réalité. Il restait encore des choses à élucider. Par conséquent, tous les regards se rivèrent vers la trentenaire rousse, qui n’avait pas terminé de parler.
— Durant votre séjour, vous apprendrez à contrôler votre don. C’est pour cette raison qu’un horaire d’entraînement repose parmi les documents que vous avez acquis. Votre numéro de chalet s’y trouve également. À présent, j’aimerais vous présenter quelqu’un. C’est la personne à qui je dois mes étonnants pouvoirs.
Tout de suite après cette phrase, une autre femme se manifesta sur la scène. Elle possédait de longs cheveux châtains, accompagnée d’une paire d’yeux aux iris bleus grisés. Tout comme sa consœur, celle-ci dégageait une attitude confiante qui se reflétait dans sa façon de communiquer.
— Bien le bonjour, jeunes gens. Mon nom est Samantha Alester et je suis l’associée de mademoiselle Greenwood. En toute honnêteté, c’est assez compliqué à verbaliser avec des mots. De ce fait, je me dois de revêtir ma seconde forme pour mieux vous l’expliquer.
À l’évidence, le camp Éléments gardait des surprises en réserve. Les mystérieuses capacités de la directrice ne pouvaient aucunement rivaliser avec ce que démontra sa coanimatrice. Son métabolisme commença à subir une étonnante transformation. Sa peau adopta un aspect durci ressemblant à du quartz poli. Qui plus est, une série de stalagmites poussa le long de son dos. Dorénavant, l’être qui se tenait devant l’audience n’était plus humain. C’était quelque chose d’autre.
— Ici, mon espèce est connue sous une appellation spécifique. Il s’avère que je suis « un Élément » : une force de la nature ayant une apparence humaine. Je peux modeler mon corps selon mes désirs, ainsi que faire des choses encore plus époustouflantes que ma consœur. Si elle peut utiliser ses pouvoirs, c’est grâce à moi. Nos destinées ont été reliées par Mère Nature et nous avons désormais accès à la même jauge de puissance. Bien sûr, c’est le cas de chacun d’entre vous. Un partenaire vous a été attribué et vous accompagnera lors de votre formation. Plus vous les côtoierez, plus vous pourrez contrôler vos capacités.
— À l’heure qu’il est, coupa sa collègue en regardant sa montre, ceux-ci doivent déjà vous attendre à l’extérieur du bâtiment. Une fiche à leur sujet est présente dans vos enveloppes. Je doute que vous ayez du mal à les identifier. Maintenant, je crois que nous pouvons nous arrêter là. Si vous souhaitez en apprendre davantage sur ce que l’on vient de divulguer, il y a aussi un livret d’informations qui a été placé dans vos documents. Prenez le temps de vous familiariser avec notre milieu. Je laisse le soin à vos futurs amis de vous faire visiter nos installations et de vous accompagner jusqu’à votre logis. Vous pouvez disposer pour le reste de la journée, puisque demain sera un grand moment. Votre formation en tant que maître élémentaire peut commencer !
À la suite de cette conclusion énergique, Lolya ne savait plus quoi penser. L’estivalière avait atteint son quota d’émotions. Tout cela était trop beau pour être vrai. Néanmoins, elle avait véritablement posé les pieds dans un endroit où ses occupants possédaient des capacités hors du commun. Ses doigts se glissèrent alors dans l’objet de papier qu’elle tenait. D’un seul coup, elle en retira l’intégralité du contenu. En l’examinant, une carte du camp se manifesta. Un outil qui lui serait fort utile. Plus tard, une photographie attira son attention. Celle-ci était maintenue par un trombone à la surface d’une feuille où un nom, ainsi que diverses informations résidaient. Cela ne faisait aucun doute. Il s’agissait de son supposé partenaire.
— Seth Onaya, murmura l’adolescente en contemplant la myriade de données.
Le jeune homme posait avec allégresse devant un lac. Des cheveux noirs, à l’apparence ébouriffée, et de jolis iris à la coloration ambrée étaient les caractéristiques qui contrastaient le plus. Selon les renseignements qui l’accompagnaient, celui-ci était âgé de seize ans. Il semblait également célébrer son anniversaire, car la date de sa naissance était identique à celle de son observatrice. La grimace qu’il arborait lui octroyait un aspect espiègle. Sans prendre en compte le signe V qu’il exécutait à l’aide de sa main droite. Malgré tout, la curiosité envahit la principale intéressée. Le moment était venu de rencontrer cet énigmatique garçon. D’après les dires d’Élisabeth Greenwood, ce dernier patientait hors du pavillon. La maîtresse de l’eau serra donc le manche de sa valise. C’était le point de non-retour. En inspirant, ses pas la menèrent vers l’attroupement s’étant dirigé vers la sortie. La journée était loin de toucher à sa fin. De nombreux mystères attendaient toujours d’être dévoilés.
À suivre…
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Note(s) de l’auteure
- Voilà, les gens ! Ceci était le chapitre 1 d’Éléments ! Merci infiniment de l’avoir lu. Si vous l’avez aimé, n’hésitez pas à me laisser des j'aime, des commentaires, ou à vous abonner à moi. Ça m’encourage à continuer d’écrire des histoires comme celle-ci.
- Je sais qu’on est encore au début de l’histoire, mais je tenais à vous dire que j’ai puisé mon inspiration à partir d’un rêve que j’ai fait il y a quelques années, de la série Avatar : le dernier maître de l’air, du manga Soul Eater, ainsi que du jeu Genshin Impact. Éléments est donc un amalgame de toutes ces choses.
- Je ne vous cacherai pas que je suis curieuse de voir combien de claques Yuka va se prendre de la part de sa sœur tout au long de l’aventure. XD
- Par pure curiosité, si vous étiez invité à séjourner au camp Éléments, quel serait l’élément que vous contrôleriez ? 😜 Moi, je choisirais probablement l’eau ou l’air.
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